Les baisers de Céline

Céline vampire

Les Baisers de Céline

Chapitre 1 – Joyeux anniversaire
Quand le feu devient froid, qui est là ?
On dirait bien que c’est moi.

« Mais si, fais-moi confiance. Ça va te plaire. »
La voix de Sonia paraissait étrangement confiante et Céline, bien que connaissant par coeur sa petite soeur, avait cette fois-ci du mal à lire en elle.
- Je me demande bien où tu m’emmènes…
- Tais-toi un peu, on y est presque.
- On aurait pu prendre le bus.
- Il n’y a pas de bus qui passe dans ce trou du cul du monde.
Sonia marquait un point. Céline, qui venait ce jour-là d’avoir 23 ans, n’avait jamais été pratiquement surprise des cadeaux d’anniversaire que lui offraient sa soeur. Quand elles étaient plus jeunes, elle lui offrait surtout des cadeaux qui finissaient par lui servir à elle. En tout cas, jamais rien de bien sérieux. C’est pour cette raison précise que Céline avait hâte de découvrir sa surprise cette fois-ci. Le fait de devoir aller dans la campagne à pieds, en pleine nuit, éclairé seulement d’une lampe torche, n’était vraiment pas banal. Bien qu’animée d’une légère appréhension – se pourrait-il que ce soit une blague ? – Céline éprouvait de la joie en voyant que sa soeur s’était donné tant de mal pour elle. L’amour qu’elle lui portait était donc réciproque.
Sonia s’arrêta au milieu d’un champ de maïs.
- On y est, dit-elle.
- Mais il n’y a rien, ici.
- Attends un peu.
Quelques secondes s’écoulèrent.
- Qu’est-ce qu’on attend ? demanda Céline, les yeux toujours rivés sur le champ vide.
Pas de réponse.
 » Sonia ? »
Elle se retourna. Personne. Sonia était partie – avec la lampe-torche. Céline se retrouva alors seule dans un noir presque total. Elle se dit de prime abord qu’il s’agissait d’une blague et que sa soeur allait bientôt surgir pour lui faire peur. Une blague d’anniversaire plutôt « originale », ça oui.
Une minute. Deux minutes. Trois minutes. Rien.
Céline regarda autour d’elle et aperçu une petite lumière blanche au milieu de la route, à une vingtaine de mètres. Elle s’approcha lentement. C’était la lampe de Sonia, gisant par terre comme un animal écrasé. C’est à ce moment-là que Céline réalisa qu’il ne s’agissait peut-être pas d’une blague.
Elle ramassa la lampe, regarda autour d’elle, appela plusieurs fois sa soeur mais sans réponse. Elle parcourue alors le champ en promenant le faisceau de sa lampe autour d’elle. Elle ne trouva qu’un renard qui s’enfuit en la voyant. Ainsi qu’un petit animal qui s’envola – surement une chauve-souris.
Joyeux anniversaire.
Une voix. Une voix d’homme. Céline se retourna brusquement et vit enfin une autre présence humaine. Hélas, ce n’était pas sa soeur.
C’était un homme d’une trentaine d’année, plutôt beau, avec de longs cheveux blancs qui lui tombaient jusqu’au milieu du dos, habillé d’un manteau noir, affublé d’un chapeau noir, avec deux yeux noirs profonds. Il était extrêmement séduisant, mais Céline ne s’attendait pas à tomber sur une telle personne au milieu d’un champ, en pleine nuit.
- S’il vous plaît, je cherche ma soeur, elle est un peu plus jeune que moi et elle me ressemble, vous ne l’auriez pas…
Avant que Céline ne put finir sa phrase, l’homme disparu instantanément, comme un mirage. Elle sentit alors un souffle chaud derrière elle.
Joyeux anniversaire.
Deux pointes se plantèrent alors dans son cou et Céline sentit une atroce douleur. Un liquide chaud coula sur son dos et sur sa poitrine. Elle comprit très vite qu’il s’agissait de sang et qu’elle était en train de se faire mordre par l’homme qui venait de lui souhaiter un joyeux anniversaire.
Céline se débattit mais la force physique de l’homme noir semblait de loin supérieure à celle d’un homme ordinaire. Il n’eut aucun mal à la tenir immobile, pendant qu’il lécher le sang qui lui sortait de la nuque avec une langue qui avait une texture étonnement lisse.
Céline sentit alors sa conscience la quitter rapidement…Elle eut le temps de voir une dernière chose avant que l’obscurité n’envahisse complètement ses yeux. Elle sentit également quelque chose.
Mais…Tu…

Chapitre 2 – Embrasse-moi, vampire !
Et les cauchemars sont bons, si bons…
Papa avait raison
Il disait que les cauchemars étaient bons.

Ce matin-là, Céline ne se réveilla pas dans son lit comme elle l’aurait voulu, ni dans un champ comme elle s’y serait attendu mais sur un banc, en plein centre-ville de Limoges – la ville où elle habitait -, devant la fnac. Une couverture couleur-crème, visiblement neuve se trouvait sur son corps et Céline avait extrêmement chaud. Bien plus chaud que si elle était dans son propre lit, avec sa propre couverture. Elle s’assit sur le banc pour reprendre ses esprits. Sa tête tournait et elle sentait une douleur en deux points de sa nuque. Elle se souvint alors de ce qui s’était passé la nuit de son anniversaire…Non, c’était impossible. Ça n’arrive que dans les films.
Céline était une grande amatrice de films d’horreur, depuis qu’elle avait vu Urban Legend III à la télévision étant petite. Elle en avait vu une bonne cinquantaine depuis et connaissait bien les histoires de vampires. Elle savait tout sur eux, du moins, elle croyait tout savoir jusqu’à présent. L’une des choses dont elle était sure, c’est qu’ils n’existaient pas. Et pourtant…
Perdue à essayer de se souvenir, et probablement sous l’emprise du choc, Céline mit un certain temps à comprendre pourquoi la couverture qu’on lui avait laissé était si chaude. La texture ne faisait pas penser à du tissu, ni la couleur. Il s’agissait plus de…peau humaine ?
Céline, dégoûtée, jeta la couverture sur le sol et s’enfuit vers son appartement. Elle devait raconter tout ça à son copain mais…le croirait-il ? Qui croirait une telle histoire ? Non…A lui, elle pouvait lui faire confiance, elle le savait. Il n’avait jamais trahit sa confiance. Il la croirait certainement.
Arrivée chez elle, Céline connu un instant effroyable quand elle ne trouva pas ses clefs. Pourtant, elle était certaine de les avoir prises avec elle la nuit dernière. Les lui aurait-on volées ? Il y avait tant de scénarii possibles. Ne les trouvant pas, elle appela son copain au téléphone…pas de réponse. Elle réalisa alors quelque chose.
Sonia.
Elle ne savait toujours pas ce qu’elle était devenue. S’était-elle faite attaquer, elle aussi ? S’était-elle faite mordre ? Etait-elle en vie ? Au Diable son appartement, il fallait qu’elle retourne dans cette satanée campagne pour retrouver sa soeur.
« C’est ça que vous cherchez ? »
Céline regarda sur sa droite. Un jeune homme métisse aux cheveux frisés d’une vingtaine d’année. Il avait une démarche un peu étrange et ne se tenait pas droit. Ses yeux étaient très sombres. Céline remarqua qu’il lui ressemblait un peu.
Il lui tendit un trousseau de clef. C’était le sien.
- Vous l’avez fait tomber. J’ai pensé que vous en aurez besoin.
- Merci, dit Céline en prenant le trousseau.
Le jeune homme changea de trottoir et se dirigea vers la fac de sciences qui devait se trouver 500 mètres plus loin.
Céline put enfin rentrer chez elle.

Chapitre 3 – La mère du soupir
Mater Suspiriorum

- Salut !
- Salut, qu’est-ce que tu fais là ?
- Tu m’as donné les clefs, rappelle-toi. Comme je n’ai pas pu le fêter avec toi hier à cause du boulot, je suis venu te le souhaiter aujourd’hui. Bon an…
- Ma soeur a disparu !
Engueran, le copain de Céline, la regarda d’un air surpris et interrogateur. Elle s’apprêtait à poursuivre, quand, tout à coup, une vive douleur lui traversa la nuque, puis l’épaule, et se répendit dans tout son corps. Céline s’affala sur le sol. En plus de la douleur, elle avait soif.
« Céline ! Qu’est-ce qui t’arrive ? »
Céline toussait de manière incontrôlable pendant qu’Engueran se précipita sur elle pour essayer de la relever.
« Céline…Tes yeux… »
Mais Céline n’entendit pas ce qu’il disait. Son corps semblait étrangement lourd et sa conscience se faisait de plus en plus floue. Elle n’aurait su l’expliquer avec des mots mais elle se sentait de plus en plus comme un animal. Un animal affamé.
« Céline…Tes dents… »
Céline soupira. Elle saisit le torse du jeune homme d’une main terminée par cinq griffes de chat et le jeune homme poussa un cri de douleur. Sans effort, Céline se releva, sans lâcher son copain. Elle ouvrit une bouche béante et…
« Céline… »

Quand Céline se réveilla, elle ne se souvint d’abord ni d’avoir vu Engueran, ni même de l’incident de la nuit précédente. Seulement que Sonia avait disparu. La vue du cadavre ensanglanté qui gisait sur le sol de son appartement, et dont les deux chats de Céline faisaient leur repas, lui rafraichit la mémoire.
« Non…Ça ne peut pas être vraie…C’est un cauchemar… »
Pourtant, ce qui se trouvait devant elle n’avait rien de factice. L’appartement était sans dessus-dessous. Visiblement, le jeune homme s’était débattu. Les murs et le sol avaient été décorés de perles rouges vives et le cadavre se tenait par terre, immobile, deux énormes trous dans la gorge. C’était la première fois que Céline voyait un mort.
C’est moi qui ai…
La jeune femme éclata en sanglot. Elle ne se souvenait pas avoir été si malheureuse depuis l’accident de scooter de Sonia, deux ans auparavant. Elle avait retenu cet évènement comme le pire souvenir de sa vie…mais là…L’une des personnes qui lui était la plus chère venait de mourir…sous sa lame. Elle venait de commettre un meurtre. Comment vivre avec ça ? Et puis, sa vie était finie. Elle allait passer le restant de ses jours en prison. C’était surement ce qu’elle méritait.
Céline s’approcha du mort, déposa un baiser sur ses lèvres et continua à pleurer.
Ne m’oublie jamais. Ne me pardonne jamais.

Chapitre 4 – La mère des larmes
Mater lacrimarum

Après avoir déposé le corps dans son lit, recouvert d’une couverture, et avec des fleurs posées sur son corps – Céline n’avait pu mettre que ce qu’elle avait trouvé, des tournesols – la jeune femme était en train de faire son deuil. Elle n’arrivait pas à réaliser qu’elle venait de tuer celui qui lui avait donné tant d’amour, bien plus que son père, et qu’elle ne l’avait jamais vraiment remercié. Elle aurait voulu remonter le temps et écrire une lettre à la petite fille qu’elle était 10 ans auparavant pour lui dire comment ne pas faire d’erreur, comment rembourser sa dette envers les autres et surtout comment éviter ce qui était arrivé. Elle savait qu’elle n’arriverait pas à dormir pendant des semaines, des mois – peut-être plus jamais – à se questionner sur comment changer le passé. Étrangement, pourtant, c’est la situation inverse qu’elle s’imaginait. Elle voyait une petite fille, une Céline de 12 ans lui remettre une lettre lui demandant de sourire, de ne pas oublier comment être heureuse, et à la fin de la lettre il y aurait écrit « Je prie pour ton bonheur, future-moi. » Pourquoi s’imaginer un tel scénario ? Bref…
Après avoir estimé avoir fait son deuil – mais serait-il un jour terminé ? – Céline se dit qu’elle avait deux choses à entreprendre : se soigner de cette « maladie » – car la voilà vampire, ne l’oublions pas-  et retrouver sa sœur. A vrai dire, elle n’avait aucune idée de comment résoudre l’un ou l’autre des problèmes et la seule personne à qui elle pouvait se confier venait de périr sous ses crocs.
La seule ? Non. Il y avait une personne qui la comprendrait peut-être, elle était jeune mais…
NON !
Elle ne pouvait pas prendre le risque de tuer un autre proche, surtout pas son petit frère. En fait, elle ne devait plus voir personne, ni sortir de chez elle. C’était beaucoup trop dangereux. Il aurait suffit qu’elle ait encore faim ou soif…ou quoi que ce soit.
Céline avait besoin de se reposer. Elle s’allongea sur son canapé et mit un temps déraisonnable à s’endormir, après toutes ses émotions. Plusieurs questions se bousculaient dans sa tête : Engueran allait-il se réveiller et devenir un vampire lui aussi ? Et elle, qu’allait-elle devenir ? De quoi allait-elle se nourrir ? De sang d’animaux ? Et surtout, est-ce que Sonia était un vampire, elle aussi ?
Au bout de plusieurs heures, Céline aurait pu s’endormir et l’aurait fait si ça ne s’était pas produit. Alors qu’elle sombrait dans les bras de Morphée, elle sentit, presque imperceptiblement, quelque chose bouger…quelque chose…dans son ventre.

Chapitre 5 – La mère des Ténèbres
Mater Tenebrarum

1
Céline sauta hors de son canapé. Non…Elle avait rêvé…C’était impossible. Impossible. Impossible. Impossible.
Elle resta sans bouger 10 bonnes minutes, attentive au moindre mouvement dans son corps. Au bout d’un quart d’heure, ça bougea à nouveau. Un coup de pied ? De poing ? D’autre chose ? Céline éclata de nouveau en sanglot. Comment cela était-il arrivé ? Etait-ce l’homme en noir ou, pire encore, avait-elle…
Non.
Que faire ? Si ses déductions étaient exactes, non seulement elle allait bientôt avoir faim, mais en plus, elle allait devoir nourrir cette…chose.
A moins que…
Céline se précipita dans sa cuisine et en sortit une grande paire de ciseaux. Elle pointa la double lame vers son ventre, pris une grande inspiration et…
Tu n’oseras jamais…
D’où venait cette voix ? Céline l’avait entendu dans sa tête, mais ce n’était pas la petite voix avec laquelle elle pensait d’habitude.
Tu n’es qu’une lâche…
Céline lâcha les ciseaux et prit sa tête dans ses mains, y enfonçant ses nouvelles griffes jusqu’à se faire saigner. Elle avait presque oublié qu’elle était désormais dotée de griffes. Il fallait qu’elle se voit. Dans les films, les vampires n’ont pas de reflet dans un miroir. Elle devait le vérifier par elle-même.
Elle couru jusqu’au miroir de la salle de bain et supposa que certains faits qu’on voit dans les films étaient des inventions car elle pu se voir…mais eu énormément de mal à se reconnaître. Ses yeux étaient aussi rouge que du sang, ses canines étaient plus longues que celles d’un chat et sa peau était blanche comme celle d’un albinos. Etrangement, elle se trouvait presque plus belle qu’avant.

C’était décidé, elle allait appeler quelqu’un. N’importe qui. La police. Les pompiers. L’hôpital. Il fallait qu’on l’aide. De toute façon, on la croirait en voyant ses canines, ses yeux et son tain.
Céline sortit de la salle de bain et sortit son téléphone de la poche de son jean. Lorsqu’elle commença à composer le 15, elle sentit une atroce douleur dans son ventre, qui lui fit lâcher le téléphone et s’affaisser sur le sol. Elle cracha du sang.

2
« Je peux vous aider, mademoiselle ? »
Céline ne savait pas trop quoi répondre. C’était la première fois qu’elle faisait ce genre de chose. Elle avait peur.
- Oui, vous auriez une cigarette, s’il vous plait ?
- Bien sûr, répondit le jeune homme blond qu’elle avait trouvé devant la fac de sciences.
Il lui tendit une cigarette que Céline alluma et fuma. Peut-être que ça suffirait à tuer le bébé-vampire, se dit-elle.
- Si je peux me permettre, reprit le jeune homme, pourquoi portez-vous des lunettes de soleil en pleine nuit ? Il pleut, en plus.
- J’ai les yeux très sensibles…vous venez chez moi ?
- Pardon ?
- J’habite à deux pas d’ici…Venez chez moi, s’il vous plait, j’ai quelque chose à vous dire.
Le jeune homme blond était un garçon de petite taille, avec des lunettes et qui était visiblement puceau. Comprenant tout de suite ce que voulait dire la proposition de Céline, il accepta assez rapidement. Céline le guida sans dire mot jusqu’à son immeuble.
- Vous vivez seule ? finit par demander le garçon dans l’ascenseur.
- Maintenant oui.

Céline s’approcha alors lentement du garçon qui semblait ne demander que ça. Il s’approcha également d’elle. La jeune femme, de sa main, balaya le visage du garçon pour découvrir sa nuque et mordit de toutes ses forces. Elle sentit ses dents pénétrer dans la chair du jeune garçon et, de sa langue, lécha le liquide qui jaillissait.
Le garçon anonyme hurla, mais pendant un très court laps de temps. Céline absorba assez de sang pour le tuer en un temps record. C’était la deuxième fois qu’elle tuait.
Le garçon s’écroula par terre. Céline enleva ses lunettes de soleil et finit le travail en buvant tout ce qu’elle pouvait.

Chapitre 6 – Les femmes viennent de Vénus, les vampires de l’Enfer
« Non merci, je ne bois jamais…de vin. »

Céline s’était habituée à sortir avec des lunettes de soleil. Quand on lui demandait pourquoi, elle n’osait jamais dire qu’elle était aveugle, ça ne serait pas passé, mais il lui arrivait souvent de répondre qu’elle avait les yeux sensibles à la lumière et que les lampadaires lui agressaient la vue. Quant aux gants pour cacher ses griffes, il lui suffisait de dire qu’elle avait froid.
La vie de monstre lui paraissait incroyablement solitaire. Cependant, elle commençait à se complaire au petit jeu qu’elle avait mit en place chaque nuit. Le but était simple : ramener des personnes chez elle et les dévorer. Certes, massacrer des innocents était mal, mais puisqu’elle était obligée de le faire pour survivre, autant y trouver de l’amusement. Généralement, elle invitait un homme chez elle, parfois une femme. Avant de passer aux choses sérieuses, elle lui plantait sa paire de ciseaux dans le ventre et léchait le sang qui jaillissait. Parfois, elle variait un peu : elle mordait directement, ou bien elle utilisait un couteau qu’elle passait sous la gorge de la malheureuse victime. Elle avait besoin de tuer en moyenne une personne tous les trois jours, avant d’avoir de nouveau soif. Elle cachait les corps en pleine nuit, au fond de la poubelle de son immeuble, après les avoir découpés en morceaux et mis dans un sac-poubelle. Ce n’était pas si dur de tuer de parfaits inconnus. En revanche, Céline ne pouvait se résoudre à tuer ses chats.
Deux choses l’inquiétaient toujours, cependant : sa soeur et la chose qu’elle portait en elle. Chaque nuit, après avoir pris des « forces » elle se rendait à la campagne où elle avait disparu pour essayer de retrouver Sonia, en vain. Elle avait lancé un avis de recherche à la police, mais cela faisait une semaine qu’elle attendait leur appel. Mais…avait-elle toujours une raison de s’inquiéter pour sa soeur maintenant qu’elle était elle-même en Enfer ?
La deuxième chose était tout aussi problématique, et Céline ne pouvait l’ignorer. La créature, quelle que soit son apparence, grandissait dans son ventre, elle le sentait. Visiblement, c’était bien plus rapide que pour un bébé humain. A quoi allait-il ressembler ? Aurait-il les yeux rouges lui aussi ? Aurait-il plusieurs têtes ? Ressemblerait-il à une araignée ? Et pourquoi se posait-elle toutes ces questions ? Se pourrait-il qu’elle ait développé une forme d’affection pour ce parasite ?
Alors qu’elle était en train de ranger les bras de sa dernière victime – un homme d’une quarantaine d’années – dans un sac poubelle, elle entendit la sonnette de sa porte retentir…à 3h00 du matin. La police ?
Céline sentit l’angoisse montait en elle. Ça y est, c’était fini. Elle allait finir ses jours en prison, ou pire…
Elle hésita un long moment avant d’ouvrir, mais se dit qu’elle ne pourrait fuir bien longtemps. Autant affronter la réalité dès maintenant. Elle mit ses lunettes et ses gants et ouvrit.
« Bonsoir, Céline. »
L’homme en noir. Celui qui l’avait attaqué cette nuit-là. Céline le reconnut tout de suite car il avait exactement la même apparence que la dernière fois, comme si aucun laps de temps ne s’était écoulé depuis qu’elle était devenue vampire.
« Tu peux enlever tes lunettes et tes gants. »
Céline ne savait pas comment réagir devant cette visite inattendue. Que devait-elle faire ? Lui claquer la porte au nez ? Le tuer ? Lui dire de rentrer au cas où il avait quelque chose d’important à lui révéler ? Elle se souvint alors qu’il était responsable, en plus de sa descente aux Enfers (et donc indirectement de tous ces meurtres), de la disparition de Sonia. La colère monta alors dans le coeur de Céline, et ses yeux devinrent encore plus rouges. Ses crocs s’allongèrent. Sa peau vira à un blanc semblable à de la porcelaine. Sans qu’elle ne s’expliqua pourquoi, elle se mit à quatre pattes et adopta une posture animale – semblable à un lézard. Ses griffes des mains et des pieds s’enfoncèrent dans le plancher. Elle était prête à bondir.
« C’est ça…Laisse échapper ta rage. L’objet de ta haine est sous tes yeux. Je te sens envieuse d’assouvir ta vengeance. »
Céline avait pour la première fois une envie de meurtre sans pour autant avoir soif. Elle ne se reconnaissait plus mais c’était clair, elle voulait que ce monstre paye. Elle bondit sur lui telle une grenouille à ressort. L’homme en noir arrêta son élan d’un seul mouvement de main, sans le moindre effort.
« Tu es encore faible. Ça changera avec le temps. »
Céline sentit sa rage l’abandonner après avoir été arrêtée si rapidement, puis sa colère revint brusquement. Elle donna de toutes ses forces un coup de poing à l’homme en noir qui, cette fois-ci, ne chercha pas à se défendre. Du sang coula de sa bouche.
« C’est tout ce dont tu es capable ? »
Céline donna un autre coup de poing. Même résultat.
- Bref, arrêtons ce petit jeu et discutons un moment, si tu le veux bien, dit l’homme en noir.
- Qu’est-ce que vous me voulez ?
- Te parler. Tu m’offres une tasse de…café ?
Céline regarda l’homme d’un air interrogateur et se dit qu’elle devait peut-être écouter ce qu’il avait à lui dire. C’était surement important, et ça lui permettrait peut-être de retrouver sa soeur.
- Entrez.
- Merci.
Céline ne lui offrit ni une tasse de café, ni une tasse de quoi que ce soit, mais l’invita à s’assoir. Elle n’avait qu’une hâte, c’était d’en finir.
- Alors, comment ça va, ces temps-ci ? commença-t-il.
- A votre avis ?
- Je sais. Il va te falloir un peu de patience pour que tu t’habitues et y prenne du plaisir…mais…n’as-tu pas commencé à y prendre goût ? Je veux dire, au meurtre.
- Non, mentit Céline.
En vérité, même si elle ne pouvait l’admettre – car il faut avouer que c’était une vérité difficile à s’expliquer – elle avait commencé à se prendre au jeu. Séduire des hommes et des femmes pour les assassiner était certes un jeu cruel et macabre, mais un jeu quand même.
- Vous devez savoir que…commença Céline.
- Oui, je sais. Il sortira dans environ deux mois, et il sera bien plus meurtrier que toi.
- Comment je peux arrêter ça ?
- Tu ne peux pas.
Céline avait envie de pleurer. Alors, elle ne pouvait rien faire pour empêcher le monstre qu’elle portait de naître ?
- Et si j’avortais ? s’essaya-t-elle à demander.
- Il survivra. Et il essaiera de t’en empêcher en te faisant mal. Tu as bien dû sentir cette horrible douleur quand tu as voulu t’en débarrasser…Si tu essaies de le tuer, il te tuera. Il sortira alors prématurément, fragile mais en vie. Il n’a pas besoin d’une mère pour grandir. Juste d’un ventre pour naître.
Céline sentit les larmes couler de ses yeux rouges.
- Parfois je le sens…commença-t-elle.
- C’est normal de le sentir bouger.
- Non, je veux dire…pas dans mon ventre. Dans ma tête. Je l’entends. Il me parle.
- Et que dit-il ?
- Qu’il a soif. Que je ferais mieux de faire ce qu’il dit.
- Alors tu sais ce qu’il te reste à faire.
- Pourquoi moi ?
- Les choses sont ainsi faites, il ne nous est pas toujours donné de raisons à notre calvaire. Une personne ayant un cancer se demandera aussi « Pourquoi moi ? » mais personne ne saura lui répondre. Ta maladie à toi, c’est l’enfant que tu portes. N’as-tu pas la moindre affection pour lui, malgré tout ?
Céline réfléchit avant de répondre.
- Je…n’en sais rien, dit-elle.
- Si, tu en as. Sinon, tu ne le nourrirais pas. Tu te serais laissé mourir malgré la douleur en vous privant tous les deux de sang. Tu le sais.
- Qui est-il ?
- Un enfant de la nuit. Non, un enfant de l’Enfer. Ton enfant.
- A quoi ressemblera-t-il ?
- Je n’en sais rien. A quoi voudrais-tu qu’il ressemble ?
- A un être humain.
- Pour ça tu repasseras.
- Je le tuerai quand il naîtra.
- Pourquoi tant de haine ? Tu n’as pas besoin de lui en vouloir pour ce qu’il est. C’est déjà très dur d’être un monstre. Tu le sais depuis quelques jours, et la solitude est en train de t’user…Mais tu connais le bonheur d’être normale. Imagine ce que lui, qui vivra toujours dans la différence et dans la solitude, pourra ressentir.
- Tu m’embrouilles…

 

Chapitre 7 – Vampire ? Vous avez dit vampire ?

Cinq jours.
C’est le nombre de jour pendant lesquels Céline s’était privée de sang. Elle avait résisté aux demandes tortueuses de l’enfant avec une bravoure exemplaire. Elle ignorait jusqu’alors qu’il était possible de ressentir pareille douleur – à quoi ressemblerait, dans ce cas, l’accouchement ?
La jeune femme ignorait également combien de temps elle allait encore tenir jusqu’à la mort de l’enfant…ni même si elle aurait la volonté de tuer celui ou celle qu’elle portait. Elle remarquait cependant que celui-ci avait de moins en moins de force. Les attaques dans son ventre étaient de moins en moins violentes, la voix dans sa tête, menaçant de la tuer si elle continuait, était de plus en plus faible. Peut-être allait-elle remporter la bataille.
Des changements apparaissaient sur son corps également. Elle paraissait de plus en plus épuisée, son teint avait maintenant quelque chose de maladif et surtout, ses yeux étaient devenus bleus ciel. Elle n’avait donc plus besoin de les cacher, c’était déjà ça. Mais elle n’allait pas pouvoir continuer longtemps comme ça, car elle avait terriblement soif. Elle n’arrivait pas à se résigner à se laisser mourir et voyait cette épreuve de force comme une bataille de volonté : lequel des deux tiendrait le plus longtemps ? Plus le temps passait, moins la douleur physique la dérangeait. Au moins, elle se sentait vivante, elle qui était, en quelque sorte, morte.

Une idée germa dans son esprit. Rien ne l’obligeait à affronter cette épreuve seule. Et si elle en parlait ? Allait-on l’aider ? Certes, personne n’allait croire qu’elle était un vampire – du moins, tant que ses yeux resteraient bleus – mais après des radios, ou bien une échographie, on comprendrait que ce qu’elle portait était une abomination et on l’aiderait à l’extirper. Et là, elle en serait enfin débarrassée. Rien, absolument rien, ne l’obligeait à révéler qu’elle avait un quelconque lien avec tous ces meurtres – ou plutôt ces disparitions. Il lui suffirait de dire qu’elle était enceinte et qu’elle avait besoin de radio. Le reste viendrait tout seul. Si tout se passait comme prévu.
Céline se rendit donc à la clinique la plus proche de chez elle, après avoir maintes fois répété son texte.
- Il me faudrait une rad…une échographie. Je suis enceinte de…7 mois. Mère célibataire.
- Euh…oui, quand les voudriez-vous ?
- Tout de suite ! C’est que…j’ai l’impression que quelque chose ne va pas. Ça me rassurerait.
- Avez-vous vu votre médecin traitant ?
- Il est…en vacances.
Céline l’avait mangé une semaine auparavant.
- Qui est-ce ?
- Monsieur… (le nom d’un autre médecin dans la région, vite !) monsieur Briancha.
- Et vous dites qu’il est en vacances ?
- Oui…je crois…
- Il ne me semble pas. Je vais lui téléphoner pour vérifier.
Céline sentit l’angoisse monter instantanément en elle. C’était fichu. Il allait répondre et dire qu’il ne connaissait aucune Céline Argento.
- Hmm…Il ne répond pas. Bon, on va quand même vous faire cette écho. Installez-vous en salle d’attente.
- Merci.
Céline attendit une bonne demi-heure. Contrainte à ne rien faire, elle était perdue dans mille pensées. Elle ne savait pas à quoi ressemblerait l’enfant, mais elle devinait quelle serait leur réaction quand ils le verraient. Dégoût, peur, cris. Peut-être était-ce le seul moyen de s’en débarrasser. Et après ? Elle resterait très certainement un vampire, elle était condamnée…Mais combien de temps allait-elle pouvoir continuer à tuer avant que la police ne découvre son génocide ? Allait-elle devoir voyager de ville en ville pour échapper à la loi ? Avec quel argent ? Et pour combien de temps ? Non, c’était irréaliste, elle s’en rendait bien compte. La meilleure chose à faire était de se rendre. Elle pouvait leur prouver qu’elle était vampire. Il lui suffisait d’un peu de sang et ses yeux s’embraseraient de nouveau, ses crocs et ses griffes s’allongeraient. Et là, on saurait qu’elle était dangereuse, mais si elle arrivait à prouver qu’elle n’était pas responsable de ses actes, qu’elle n’était pas foncièrement mauvaise, peut-être qu’ils essaieraient de l’aider. Dans le meilleur des cas, ils la garderaient dans un centre et lui donneraient du sang d’animaux. Peut-être même que certaines personnes, fascinés par l’existence des vampires, lui feraient des dons de sang. Eh puis…
« Mademoiselle Argento ? On va y aller. »
Céline sentit l’appréhension qu’elle avait accumulé depuis la prise de sa décision exploser. Il n’était plus possible de reculer. La femme-vampire suivit donc l’infirmière dans un couloir qui lui parut interminable, jusqu’à une petite salle avec une grosse machine. On lui dit de s’allonger.
- C’est la première fois ?
- Oui.
- Détendez-vous.
La faim mêlée à l’angoisse faisant trembler la jeune vampire. Elle savait que ça faisait mauvais genre, mais elle ne pouvait s’empêcher de trembler. L’infirmière étala un liquide visqueux sur son ventre, semblable à de la confiture. Puis, elle y fit promener un petit appareil.
Lorsque les images apparurent, Céline ne su comment les interpréter. Tout ce qu’elle voyait était une masse informe grisâtre bougeant sur un fond noir. Où était la tête ? Les bras ? Les jambes ?
- Détendez-vous, madame, dit l’infirmière, votre bébé semble en parfaite santé. Il est un peu gros pour sept mois mais ce rien de grave. Vous voyez ? Là c’est la tête…
- Non, écoutez-moi, il n’a rien de normal ! C’est un…
- Calmez-vous. Je sais que…
- C’est un monstre ! Vous devez m’écouter ! Il faut que vous me l’enleviez ! Enlevez-moi ça !
- Qu’est-ce que vous dites ?
- Ecoutez, je vais donner naissance à un monstre ! Je suis un vampire !
- Vampire ? Vous avez dit vampire ?
L’infirmière regarda Céline d’un regard qui fit comprendre à la jeune femme qu’elle était prise pour une folle, ce qui l’étonna guère.
« Je sais ce que vous pensez, dit-elle, mais… »
Un homme entra dans la pièce. Céline le reconnu aussitôt. C’était l’homme qui l’avait mis au monde.
« Papa ? Qu’est-ce que tu fais là ? »
« Céline…Il faut qu’on parle… »
« Et plus que tu ne le crois…Sonia a disparu. »
« Tous ces gens, tu les as… »
 » Ma soeur a disparue et je crois qu’elle est morte ! »
« Céline…tu es fille unique. »
L’infirmière poussa un cri d’effroi en regardant l’image de l’échographie.
« Est-ce que Sonia va bien ? »

FIN

Par Anthony Auzy

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Nouvelle – Les yeux blancs

oeil blancs

 

LES YEUX BLANCS
Par Anthony Auzy

Chapitre 1 – Retour vers le passé
Auriane se sentait prête pour cet examen. Elle n’aimait pas spécialement travailler – il lui fallait au moins une pause toutes les 45 minutes pendant ces révisions – mais elle n’avait jamais eu besoin de redoubler d’efforts pour suivre le rythme du lycée, et encore moins de la fac. Aussi, elle était assez confiante quant à la réussite de cette interrogation écrite de chimie. Auriane adorait la chimie. Elle trouvait fascinant de pouvoir comprendre comment fonctionne la matière, de quoi elle était faite. Comment peut-on vivre sans savoir ? se disait-elle parfois. Elle, en tout cas, ne le pouvait pas. Etudiante en Licence à la fac de sciences, elle avait quitté le lycée deux ans auparavant et était restée à Limoges pour la suite de ses études, dans l’espoir de poursuivre un Master à Grenoble.
« Salut, tu peux me prêter un stylo, s’il te plait ? »
Auriane se retourna sur sa droite. C’était un jeune garçon métisse, mal rasé, aux cheveux bouclés qui était assis à côté d’elle. Elle se dit qu’il devait être quelqu’un de discret, pour être passé inaperçu depuis qu’elle était installée.
« Bien sûr » dit-elle en lui tendant un stylo noir. Il la remercia. Auriane remarqua qu’il avait une voix assez aiguë pour un jeune homme qui avait dépassé l’adolescence.
Mais déjà, le prof distribuait les copies.
Comme Auriane s’y attendait, le sujet était facile. Il portait comme d’habitude sur l’atome, le plus simple. La jeune femme le termina au bout de 45 minutes. Elle remarqua, en sortant de l’amphithéâtre, que le jeune garçon à côté d’elle rendit sa copie pratiquement au même moment, ce qui fait qu’ils étaient les deux premiers à finir.
En sortant dehors pour se diriger vers sa voiture, Auriane entendit à nouveau cette voix stridente si reconnaissable, qui venait de derrière elle.
- Hé…attends…heu…Tu as réussi ?
- Oui, je crois. C’est pas trop dur, la chimie.
- Moi j’ai galéré…
- Pourtant, tu as fini en avance.
- Parce que je ne savais rien faire de plus, ça servait à rien de rester à attendre la fin et…pour être honnête, j’attendais que tu finisses. Tu as une certaine réputation, on dit que tu es bonne élève, spécialement en chimie.
- On dit ça ?
- Oui, et justement, je cherche quelqu’un pour m’aider. J’ai vraiment besoin de réussir mon année.
- Ah, je vois…Eh bien, je n’ai pas vraiment le temps de…
- Je te paierai.
Auriane prit quelques secondes pour réfléchir, chose qu’elle n’arriva pas à dissimuler.
- C’est d’accord.
- Super Auriane, euh…je peux prendre ton numéro, s’il te plait ?
- Bien sûr.

Après cette brève rencontre avec un individu qu’Auriane n’aurait su qualifier, la jeune femme pu enfin rentrer chez elle. Pendant le trajet en voiture, elle se remit inexplicablement à repenser à Noémie.
Noémie avait été la jeune professeure d’italien d’Auriane au lycée et, pour une raison qui lui échappait toujours, elle était tombée follement amoureuse d’elle, dans le plus grand secret bien entendu. Ses sentiments s’étaient tournés vers l’obsession pendant trois longues années, avant que quelques séances chez le psychiatre et la rencontre avec son copain ne l’aide à oublier cette idolâtrie. Cependant, comme de tels sentiments ne s’effacent jamais complètement, il lui arrivait parfois d’y repenser…brièvement.
Ce soir-là, pourtant, elle y repensa pendant plusieurs heures. Même pendant le dîner – qu’Auriane partageait avec sa mère, son père vivant dans un autre quartier de Limoges – elle ne pouvait la chasser de son esprit. Certes, ce n’était pas aussi intense que les heures passées à rêver d’elle pendant la période lycée, mais quand même, la jeune femme avait l’impression qu’elle reculait de plusieurs pas. C’était comme un poison qui s’emparait peu à peu d’elle…Non, comme un parasite qui avait planté ses griffes en elle. Auriane se demandait la raison d’un tel retour en arrière. La rencontre avec l’étrange garçon, peut-être ?
Noémie – ou Nono, comme Auriane avait l’habitude de l’appeler à l’époque – était une femme d’une trentaine d’année, plutôt mince, assez belle et visiblement plutôt intelligente. Auriane ne su jamais pour quelle raison elle était tombée amoureuse d’elle. Il n’y avait aucune logique scientifique derrière cela et les 3 psychologues qu’elle avait vu n’avaient pas vraiment su l’éclairer. Pire encore, elle n’avait jamais rencontré personne dans le même cas. Elle n’avait donc personne à qui se confier, personne qui était capable de la comprendre, de ressentir ce qu’elle ressentait. Avant de la rencontrer, les relations gays et lesbiennes avaient toujours laissé Auriane indifférentes. « Ils ne peuvent pas faire comme tout le monde ? » se disait-elle parfois en les regardant ce bécoter. Lorsque cela lui tomba dessus, ce fut un véritable choc pour elle qui se croyait insensible à ce genre de chose. Eh puis…
Auriane nourrit ses deux chats – Myrtille et Paillette, respectivement rousse et noire et blanche – tenta de réviser un peu ses cours sur lesquels elle avait énormément de mal à se concentrer, et alla se coucher tôt, pour plonger dans un sommeil qu’elle devinait agité. Noémie était très souvent apparue dans ses rêves. Mais ça, c’était avant, pourtant…

Chapitre 2 – Je ne l’ai pas fait exprès

Auriane mit plusieurs heures avant de s’endormir, Myrtille dormant sur ses jambes. Elle essayait de penser à son copain, Noha, aux travers de films imaginaires, de mises en scène qu’elle tentait de transformer en fantasmes, mais il n’y avait rien à faire. Noémie s’interposait toujours. Elle ne faisait rien, à part la regarder droit dans les yeux, mais cela suffisait à lui faire perdre ses moyens, et surtout à chasser l’image de Noha – s’il savait…Eh puis, il y avait cet étrange garçon. Quelque chose n’allait pas chez lui. Elle s’était remise à penser à Nono juste après l’avoir rencontré. Pourquoi ?
« Salut, tu peux me prêter un stylo, s’il te plait ? »
Avant de sombrer dans les bras de Morphée, Auriane cru voir deux petits yeux blancs luire dans le noir, fixant les siens.
Le matin, Auriane s’extirpa très progressivement du sommeil. Elle avait l’impression d’avoir dormit des jours. Retrouvant peu à peu sa conscience, elle se demanda pourquoi son réveil ne sonnait pas et regarda l’heure….11h30 ?! Elle était censée être en cours depuis au deux heures et demi ! Quatre appels manqués, dont un de Noha. Elle lui expliquerait plus tard, le temps pressait. Comment avait-elle pu dormir autant ? Elle se souvenait juste d’avoir rêvé de Noémie nue – et notamment de seins protubérants – ainsi que d’un objet, mais elle ne se souvenait pas ce que c’était. En revanche, elle se souvenait avoir mal aux jambes.
Bref, l’heure était à la vitesse. Elle avait cours jusqu’à 13h, elle serait en retard, mais elle avait peut-être une chance d’avoir une absence de moins si elle se dépêchait. Pas le temps de prendre une douche. Ses vêtements. Ses chaussures. La voiture.
La jeune femme, tout en conduisant, réalisa qu’elle ne pensait plus à Nono. Le cauchemar semblait terminé. Ce devait être une crise passagère. C’était cela, rien de plus.
Une fois arrivée à la fac et descendue de son véhicule, elle ne comprit d’abord pas ce qu’elle voyait. Un grand nombre d’élèves étaient rassemblés devant la porte d’un amphithéâtre – l’amphi Duchaigne, ou Dugland comme ils aimaient tous l’appeler – et regardaient quelque chose. Auriane devait aller en cours, mais la curiosité était bien trop forte pour ignorer ce mouvement de foule. Elle se fraya un chemin dans le groupe de jeunes et découvrit ce qui les avait amenés à se rassembler : un couteau planté dans un pigeon mort, cloué à la porte. Avec du sang, était inscrit la phrase « Je ne l’ai pas fait exprès. »

Chapitre 3 – Le lettre

Un professeur arriva et demanda à tout le monde de retourner en classe. Les élèves ne se bousculèrent pas trop pour quitter les lieux et le professeur dû se répéter plusieurs fois avant que l’espace devant l’amphithéâtre ne se vide. Il était midi. Auriane alla en salle de cours et s’excusa de son retard, déclarant qu’elle n’avait pas entendu le réveil. L’explication passa et elle s’installa. Difficile, cependant, de se concentrer sur ce que disait le professeur après ce qu’elle venait de voir – mais elle ne devait pas être la seule, tout le monde discutait de ce qu’ils avaient vu le matin en arrivant en à la fac. Auriane ne se sentait pas vraiment effrayée mais plutôt offensée. Oui, offensée était le mot juste. Quelqu’un était venu l’extirper de son train-train quotidien en chamboulant l’ordre établit par sa fac. C’était difficilement acceptable.
« Hé ! Tu me prêtes une feuille ? »
Auriane se retourna. Encore ce garçon. Comment avait-elle fait pour ne pas le voir ? Il était assis à côté d’elle !
- Oui bien sûr, murmura-t-elle…mais comment tu t’appelles déjà ?
- Anthony.
Auriane lui tendit une feuille blanche. Il la remercia en la regardant d’un air qui semblait vouloir lui faire comprendre quelque chose, mais elle ne saisit pas ce qu’il voulait dire.
Le cours fut interminable pour tout le monde, visiblement. Personne ne prêtait attention à ce que disait l’enseignant, qui semblait guère s’en étonner. Les conversations tournaient autour des soupçons de chacun envers telle ou telle personne. Seul Anthony ne parlait pas.
A la fin du cours, tout le monde se précipita vers la porte accidentée de l’amphithéâtre Dugland mais la police était déjà passée retirer les pièces à conviction. Auriane imaginait le coupable comme un clochard un peu fou qui avait eu envie d’effrayer des jeunes gens. C’était cela, rien de plus.
Elle reçu un SMS : « Retourne-toi »
« J’aurais besoin que tu fasses quelque chose pour moi. »
Auriane se retourna. Anthony à nouveau.
- Oui ? Quoi ?
- J’ai une amie à qui il faudrait que tu remettes cette lettre aujourd’hui. Il n’habite pas loin. 3 place des Jacobins. C’est marqué sur l’enveloppe.
- Pourquoi tu n’y vas pas toi-même ?
- Je ne peux pas. Ma mère veut que je rentre. Tu es la seule personne à qui je parle dans  cette fac alors je ne peux m’en remettre qu’à toi.
- Bon bon…d’accord. Qui est cette amie ?

Chapitre 4 – Noémie

Auriane décida d’aller à pied à l’adresse indiquée, voir cette Noémie. Quelle coïncidence, quand même…Bien sûr, la mention d’une personne de ce nom avait fait ressurgir ses démons et elle y repensait à nouveau, peut-être plus intensément encore. Elle devait en parler à Noha. Ça lui ferait peut-être de la peine. Non, ça lui ferait certainement de la peine, mais elle ne pouvait pas garder cela à l’intérieur plus longtemps.
Au bout de 10 minutes de marche, Auriane arriva à l’endroit indiqué, et fut surprise de voir qu’il s’agissait du cirque de monstres de Limoges. Auriane connaissait son existence, mais elle ne savait pas où il se trouvait. Elle ne se serait jamais imaginé qu’il était si près de sa fac…
« Freak Show » indiquait l’enseigne, suivi du sous-titre « Venez voir la monstrueuse parade ! ». Auriane hésita longtemps avant d’entrer, de peur d’y faire des rencontres inattendues. Cette Noémie serait-elle..?
« Je peux vous aider ? »
Un homme d’une quarantaine d’année. Il avait bien un nez, une bouche, deux yeux. Rien d’anormal, excepté son regard accusateur.
- Oui, j’ai une lettre à remettre pour une certaine Noémie. Il n’y a pas de nom de famille – Auriane se dit qu’elle aurait dû le demander, quelle idiote – mais c’est de la part d’un étudiant à la fac de sciences qui s’appelle Anthony.
- Ah oui, je vois, elle est dans sa loge, au fond du chapiteau.
Auriane prit son courage à deux mains – après tout, ce n’étaient que des gens au physique différent, rien de plus – et entra dans le chapiteau. Elle ne pu empêcher ses yeux de dévisager tous les monstres qui s’y trouvaient. Un homme avec des mains ressemblant à des pinces de homard, une femme avec trois seins – et une « quéquette » d’après ce qu’elle disait à son interlocuteur, un petit homme aux bras atrophiés – et Auriane aperçu aussi deux petits lilliputiens. La jeune femme se dit qu’elle avait bien de la chance d’être née avec un physique relativement avantageux, et de ne pas être obligée de gagner sa vie en se donnant en spectacle dans ce genre d’endroit.
Arrivée aux loges, Auriane frappa à une porte au hasard et tomba sur deux soeurs siamoises, absolument identiques. Elles n’avaient qu’un corps mais deux têtes.
- Oui ? dirent-elles en choeur.
- Excusez-moi, je cherche la chambre d’une certaine Noémie.
- Ah, je crois que c’est la porte de droite, c’est ça, Marie-Agathe ?
- Bien sûr que non, Marie-Lucie, tu sais bien que c’est la porte de gauche !
- Ah oui, c’est ça. La porte de gauche, donc.
- Merci.
Auriane ferma donc la porte des siamoises, qui étaient les seuls monstres depuis son entrée dans le cirque qui ne la dégoûtaient pas, et entra donc dans la loge de gauche.
Auriane ferma les yeux, mais seulement au bout de quelques secondes. Cette Noémie était en train de prendre sa douche. Auriane eut le temps d’apercevoir son corps, qui était franchement magnifique. Les courbes étaient parfaites, superbement proportionnées, et tout semblait naturel. La jeune femme avait rarement vu un corps aussi beau. Elle n’eut cependant pas le temps de voir son visage.
- Excusez-moi, vraiment, je ne voulais pas, dit Auriane, je vais vous laisser finir.
Auriane ferma la porte sans attendre de réponse. Elle se demanda, pendant les cinq minutes qui suivirent, ce qu’une femme aussi belle faisait dans un cirque de monstres. Pire encore, elle imagina une chose épouvantable…et si Noémie avait le visage de…Noémie. Si elle ouvrait de nouveau la porte et voyait le visage de son ancienne prof d’italien, comment allait-elle réagir ? Allait-elle s’évanouir ? Non, ça n’aurait aucun sens qu’elle ait la même tête. C’était stupide. Comment pouvait-elle imaginer une chose aussi stupide ?
« J’ai fini, vous pouvez entrer. »
Auriane prit son courage à demain, ouvrit la porte et regarda Noémie dans les yeux. Elle fut, pendant une première fraction de seconde, rassurée. Puis, dégoûtée et effrayée.
Le jeune femme ne ressemblait pas du tout à la Noémie qu’elle connaissait. C’était même plutôt l’inverse. Son visage était peut-être la chose la plus repoussante qu’elle ait jamais vu. La pauvre femme était complètement défigurée. Ses yeux étaient complètement blancs – avec des pupilles à peine visibles et Auriane se demanda si elle n’était pas aveugle – et sa bouche était toute déformée, avec une langue visible et une dentition irrégulière. En outre, le visage paraissait bien plus vieux que le corps.
« C’est pourquoi ? »
Quelle belle voix…
- Euh…votre ami Anthony m’a demandé de vous remettre cette lettre.
Un filet de bave, qu’Auriane fit mine de ne pas voir, coula de la bouche de Noémie. Elle tendit une très belle main pour saisir la lettre. Auriane dû s’approcher pour la lui donner.
- Merci…tu – je peux te tutoyer ? – tu  es à la fac de sciences, toi aussi ?
- Oui. Et oui, tu peux me tutoyer.
- J’ai entendu dire qu’il s’y était passé quelque chose aujourd’hui.
- Oui, enfin, cette nuit apparemment. Quelqu’un a tué un pigeon avec un couteau et l’a cloué sur la porte d’un amphi.
- Je vois. Tu as une idée de qui a fait ça ?
- Je n’ai aucune preuve mais je suis presque sure que c’est un clochard qui a voulu nous faire peur, ou bien un voisin de la fac qui n’aime pas les jeunes parce qu’il doit en avoir marre du bruit. Un truc comme ça, rien de plus.
- Surement.
- Bon, ce fut un plaisir, mais je dois rentrer. Ma mère m’attend.
- Je comprend. Passe le bonjour à Anthony.
- Je n’y manquerai pas, dit Auriane en sortant.
Au moment où elle commençait à refermer la porte, Noémie murmura quelque chose à son attention.
« Le coupable n’est pas un homme. »
Auriane arrêta son mouvement.
- Pardon ? dit-elle
- Non, excuse-moi, je me parlais à moi-même. Ça m’arrive souvent. Au revoir !
- Au revoir.
Auriane ferma la porte. Elle avait bien entendu ce qu’avait chuchoté Noémie et elle était presque sure qu’elle s’était adressée à elle. Une autre chose la perturbait. Noémie était en train d’ouvrir la lettre au moment où Auriane partait. Le coup d’oeil fut bref mais elle aurait juré que la lettre était vierge.

Chapitre 5 – La deuxième nuit

Ce soir-là, Auriane alla se coucher tôt. Elle avait quitté la table avant de finir de manger, au grand étonnement de sa mère. A nouveau, elle essayait de chasser Nono de son esprit, mais c’était plus fort qu’elle. Pensait à elle lui faisait trop de bien, et penser à Noha n’y faisait rien. Elle s’était promis de le voir et de lui parler demain.
Le passage dans ce cirque de monstres et la rencontre avec cette autre Noémie trottait également dans son esprit. Pourquoi Anthony lui aurait fait apporter une feuille vierge ? Qu’attendait-il vraiment d’elle ?
Le coupable n’est pas un homme.
Une idée germa dans l’esprit d’Auriane. Et si c’était cette fille ? Après tout, qui était-elle pour clamer son innocence, elle qui en savait tellement ? Oui, mais il y avait un os…Pourquoi lui avoir révélé cette information qui la trahissait. Voulait-elle être arrêtée ?
Sur ces réflexions, Auriane commença à s’endormir. A nouveau, elle vit deux yeux blancs la fixer dans sa chambre, alors qu’elle était à moitié en train de rêver.
Deux yeux blancs.
Elle rêva à nouveau de la femme qu’elle avait aimé, mais cette fois, le rêve se passait clairement chez elle.

Chapitre 6 – Un visiteur

Avec un effort considérable, Auriane se leva à 7h30. Elle était fatiguée comme jamais elle ne l’avait été. Elle hésitait réellement à aller en cours ou se reposer, mais cela reviendrait à avoir des absences de plus. La jeune femme s’extirpa donc de son lit, remarquant que Myrtille avait également passé la nuit dans sa chambre et qu’il grattait la porte pour sortir.
Elle sortit de sa chambre et vit alors sa mère la regarder d’un air malheureux.
« Qu’est-ce qu’il y a ? »
En guise de réponse, sa mère dirigea son regard vers le sol. Auriane le suivit, jusqu’à tomber une longue trainée de sang qui menait au cadavre de Paillette, sauvagement éventré. Auriane poussa un hurlement.
« Tu as une idée de ce qui s’est passé ? » demanda sa mère.
Auriane fit « non » de la tête sans quitter des yeux le cadavre du pauvre chat.
« Je crois que nous ne sommes plus en sécurité, poursuit la mère d’Auriane. Cette nuit j’ai cru entendre la porte d’entrée s’ouvrir. Je me suis levée pour voir ce qui se passait mais la maison était vide. C’est du moins ce que j’ai cru, mais visiblement, quelqu’un est entré. Regarde. »
La mère d’Auriane pointa son doigt vers la fenêtre du salon, qui était ouverte. Les deux femmes savaient qu’elle était fermée le soir précédent.
- C’est surement la même personne qui a mutilé le pigeon à la fac, dit Auriane.
- Oui, je crois aussi. Je pense qu’on va appeler la police. En attendant, va à la fac, je m’en occupe.
- Tu es sure, maman ?
- Vas-y. Et je vais devoir prévenir ton père aussi.
A ses mots, Auriane se figea. Elle aimait son père, mais elle en avait également peur, pour une raison qu’elle n’expliquait pas. Depuis toujours, elle se méfiait de lui. En sa présence, il lui arrivait souvent d’angoisser. Sa mère était au courant, mais elle avait préféré ne pas lui en parler à lui. Elle aurait beaucoup aimé savoir ce qui était à l’origine de cette peur incontrôlée d’un membre de sa famille.
- Je sais ce que tu penses, repris sa mère, mais je dois lui en faire part. Allez, va en cours, tu vas être en retard.
Auriane finit de se préparer et sortit. Devant le portail de la maison, elle fut à moitié surprise de voir Anthony qui semblait l’attendre.
« Salut ! »
C’était parfait. Auriane avait un tas de questions à lui poser.
« J’ai raté mon bus, reprit-il, alors comme on habite pas loin, je me suis dit que, peut-être, tu pouvais m’amener en voiture. »
Auriane accepta et les deux jeunes gens grimpèrent dans la voiture. Pendant le trajet, une conversation qu’Auriane aurait voulu plus longue commença.

Chapitre 7 – Le secret

- Bon écoute, j’ai des choses à te dire et des choses à te demander.
- Je t’écoute, Auriane.
- Dis-moi la vraie raison pour laquelle tu étais devant chez moi ce matin.
- Je te l’ai dit, j’ai raté mon bus et je ne connaissais que toi qui…
- Bon, on va présenter les choses autrement. Je suis allé au cirque de monstres hier et j’ai remis ta lettre à Noémie.
- Je te remercie. Elle allait bien ?
- Oui, surement. Bref, elle sait des choses sur ce qui se passe.
- Sur le pigeon mort ?
- Et l’un de mes chats ! Ne fais pas le mec qui ne sait rien, je suis sure que tu as quelque chose à voir avec tout ça. C’est toi qui est entré chez moi cette nuit et qui a tué mon chat ! Ou bien c’est elle…mais tu l’as forcément aidée.
- J’ignorais pour ton chat, je suis désolé. Mais tu te trompes, je n’y suis pour rien et elle non plus.
- Tu mens !
- Que t’a-t-elle dit pour que tu penses ça ?
- Elle a dit que le coupable n’était pas un homme.
- Je vois.
- Donc c’est une femme et je ne vois qu’elle.
- Qui te dit que c’est une femme ?
- Il n’y a que des hommes et des femmes dans ce monde !
Auriane commençait à sérieusement s’énerver.
« Oui, je suppose que tu as raison…On est arrivé. »
Effectivement, ils étaient au parking de la fac. Ils sortirent tous deux de la voiture.
« Laissons de côté cette question pour l’instant, rajouta Auriane. Je n’ai aucun moyen de prouver que c’est toi qui est derrière tout ça, mais si tu fais quelque chose d’autre, ou que tu l’aides à faire quelque chose d’autre, je te dénonce aux flics. »
Anthony s’apprêtait à dire quelque chose mais se ravisa. Il se contenta d’ajouter un « Bonne journée, Auriane ! » qui sonnait extrêmement faux, avec sa voix toujours plus aigüe.
- Tu…tu ne vas pas en cours ?
- Non, je sèche pour aller rendre visite à Noémie. J’ai encore une lettre à lui remettre.
Auriane le laissa partir, en réalisant un peu trop tard qu’elle avait oublié de le questionner à propos du papier vierge.

Chapitre 8 – Noha
Auriane commença la journée par ce qu’elle préférait : les TP (Travaux Pratiques) de chimie. Plus que tout, elle adorait manipuler. Sa servir de ses mains était une vraie source d’épanouissement, qu’elle qualifiait presque d’artistique. Un de ses pires songes était qu’on lui enlève cette joie.
Ormis cette première heure et demie, la journée de cours fut extrêmement longue, principalement parce qu’Auriane savait qu’elle retrouverait Noha juste après. Cette idée chassait peu à peu les tourments des nuits et des journées précédentes, et arrivait même à chasser, un peu, l’image de Noémie. Noha saurait la comprendre, et il l’aiderait. C’était certain. Il l’avait toujours comprise. Il était toujours intervenu pour la soutenir. Auriane tenait autant à sa vie qu’à la sienne.
A la fin du dernier cours, Noha l’attendait devant l’amphithéâtre. Le simple fait de le voir, de voir son sourire, balaya en un instant ses craintes et ses peines. Noémie, d’un coup, paru loin. Très loin.
« Salut, dit-il, tu voulais me parler, on va s’asseoir dans le parc et tu me racontes tout ? Ça avait l’air grave au téléphone. »

Auriane raconta tout, dans les moindres détails, sans oublier son penchant pour Noémie – la prof d’italien, pas la bête de foire – qui ressurgissait. Auriane en avait déjà fait mention à Noha auparavant, mais sans jamais entrer dans les détails, de peur de le blesser. A présent, c’était chose faite. Elle avait déballé son sac, ouvert son coeur…Elle attendait maintenant une réaction.
- C’est une sacrée histoire que tu me racontes-là…
- N’est-ce pas ?
- Comment puis-je t’aider ?
- Je n’en sais trop rien…Mais j’aimerais que tu restes à la maison cette nuit, au cas où ils reviendraient.
- Sans problème. Si ça peut t’aider, je resterai même éveillé toute la nuit pour monter la garde. Aucun son ne m’échappera !
Auriane se dit dans sa tête « Sois remercié. »

Chapitre 9 – La troisième nuit

La mère d’Auriane raconta à Noha et à sa fille la venue de la police chez eux. Ils pensaient, eux aussi, qu’il y avait un lien entre les deux évènements qui s’étaient produits récemment. Il était en réalité évident que l’agresseur était le même. Hélas, ils n’avaient aucune piste. Auriane avait demandé à Noha de garder secrète son enquête personnelle pour le moment, en attendant d’en savoir plus. Ainsi, aucun des deux amoureux n’ajouta quoi que ce soit. Auriane n’en pensa pas moins, cependant. Elle explorait dans son esprit tous les scénarios possibles…y compris…non, ça, c’était impossible.
L’heure de se coucher arriva bien vite. Auriane discuta un peu plus longuement avec Noha de tout ce qui s’était passé mais rien de ce qu’ils dirent ne fit avancer davantage l’enquête. Ils décidèrent de se reposer. La jeune femme avait insisté pour que Myrtille, le seul chat qui lui restait, dorme avec eux.
Auriane, aux côtés de Noha, ne pensa pas à Noémie…jusqu’à ce qu’elle s’endorme et vit à nouveau les deux yeux blancs. Ceux-ci brillaient avec encore plus d’intensité que lors des deux nuits précédentes, et leur présence dura plus longtemps. S’ensuit alors un rêve atroce dont Auriane se souviendrait toujours. Elle se vit en train de découper Noha en morceaux avec un hâchoir. D’abord les bras, puis les jambes. Elle se vit ensuite entailler son ventre et en extirper les tripes, avec lesquels elle l’étrangla. La rêve devint alors encore plus malsain lorsqu’Auriane embrassa le cadavre et commença à entamer une sorte de séance de sexe nécrophile…et à aimer ça.
« Auriane ! »
La voix venait de loin, mais c’était celle de Noha.
« Auriane ! Réveille-toi ! »
La jeune femme sentit deux mains la secouer par les épaules, dont une recouverte d’un liquide assez chaud.
« Réveille-toi ! »
Ça y est, elle ouvrit enfin les yeux. Elle vit alors Noha, les yeux remplis de panique. Elle baissa les yeux et remarqua une blessure au niveau de son ventre.
« Lâche-ça, je t’en prie. »
C’est seulement alors qu’Auriane se rendit compte qu’elle tenait un hachoir dans la main. Il était ensanglanté. Auriane le jeta par terre comme si c’était une araignée qui gigotait dans sa main. Elle réalisa alors qu’elle avait du liquide autour des lèvres et un goût de sang dans la bouche.
« Qu’est-ce qui s’est passé ? » demanda-t-elle, bien que devinant l’inadmissible réponse.
- Je…Je crois que tu es somnambule, répondit Noha. Je me suis endormit alors je ne sais pas ce qui s’est passé au début mais tu as dû te lever pour chercher ce hachoir dans la cuisine. Et quand tu es revenu, tu m’as réveillé en me le plantant dans le ventre. Je crois que la blessure n’est pas profonde. »
- Mon Dieu…fais voir !
La blessure, effectivement, n’avait pas l’air profonde, mais nécessitait de désinfecter et de coller un pansement rapidement.
« Je vais te chercher ce qu’il faut ! »
Auriane se précipita jusqu’à la salle de bain, et passa devant la porte de la chambre de sa mère. Elle entendit toquer avec insistance.
- Maman ?
- Auriane, j’ai entendu du bruit alors j’ai voulu sortir mais la porte est fermée. Ouvre-moi !
Auriane se souvint alors, dans son rêve, avoir fermé une porte à clef. Elle ouvrit à sa mère.

Chapitre 10 – Explications

Auriane et Noha racontèrent tout à la mère de la jeune femme, depuis la rencontre avec Anthony. La dame n’en revenait pas.
- Donc, c’est toi depuis le début…Tu es somnembule, dit-elle.
- Non, je ne crois pas que ce soit seulement ça, intervint Noha. Je pense plutôt à de l’hypnose. Cette femme défigurée aux yeux blancs vient chez toi avec l’aide de cet Anthony et t’hypnotise par je ne sais quelle magie pour t’ordonner de faire toutes ces choses.
- Mais Noha, dit Auriane, tu te rends compte de ce que tu dis ? Tu parles de magie…
- Je sais ce que tu penses…mais il y a des choses qu’on ne comprend pas toujours, répondit-il.
- Il faut prévenir la police, déclara la mère d’Auriane.
- Oui !
- Oui !
La mère d’Auriane alla décrocher le téléphone et composer le numéro pendant que Noha alla soigner sa blessure dans la salle de bain. En attendant, Auriane cogitait. Elle avait manqué de tuer l’une des personnes qu’elle aimait le plus au monde…On lui avait prit l’une des choses qui lui étaient le plus précieuses : son corps, son libre arbitre. On avait capturé son esprit pour s’en servir comme d’une marionnette. Jamais elle ne pourrait pardonner cela. Quel était le but ? Pourquoi faire des choses aussi atroces ?
Ses os étaient épuisés et la jeune femme essayait tant bien que mal de rester éveillée. Si elle s’endormait, ça risquait de recommencer.
Ne pas s’endormir.
Les lumières s’éteignirent. Une coupure de courant ?
Ne pas s’endormir.
Les deux yeux blancs apparurent.
Ne pas…

Chapitre 11 – La nuit la plus longue
Le matin approche. Je me réveille dans le noir, me demandant ce que j’ai fait. Je sors peu à peu de l’illusion. Mes os épuisés. Du sang sur mes mains. Sur mes lèvres. Les yeux blancs ont disparu. Est-ce le présent ? Suis-je morte ? Ai-je ouvert ton crane ? Ai-je dansé sur sa ta tombe ?

Lorsque Noha et la mère d’Auriane revinrent dans le salon, la jeune femme avait disparu. Elle fut introuvable dans l’ensemble de la maison – bien que le hachoir dans sa chambre avait également disparu – et toutes les portes et fenêtres étaient fermées. Noha voulu sortir pour la retrouver et remarqua alors quelque chose : la porte d’entrée était fermée de l’extérieur. Auriane était donc bel et bien sortie par là. Il comprit qu’elle s’était faite à nouveau hypnotisée, et qu’elle était armée. Il dit à sa mère de rester à la maison au cas où sa fille reviendrait, puis sortit par la fenêtre.

Dans sa loge, Noémie dormait paisiblement. Elle avait effrayé pas mal de personnes durant le spectacle de ce soir, et elle en était plutôt satisfaite. C’était amusant d’effrayer les gens. Noémie y avait toujours pris du plaisir, puisque, de toute façon, c’était tout ce qu’elle pouvait faire. C’était disait-elle, sa seule manière d’interagir avec le commun des mortels. De toute façon, elle n’était pas seule, il y avait ses amis-monstres. Elle savait à quel point leurs liens étaient soudés.
Elle fut révéillée par le bruit de grincement de la porte de sa loge.
« Y a quelqu’un ? » demanda-t-elle.

Noha refusa d’attendre la police et se lança en voiture au cirque de monstres pour y retrouver Noémie, Anthony et bien sûr Auriane. Il n’avait pas l’intention de la laisser commettre un meurtre et finir en prison. Il savait qu’elle n’était pas responsable de ce qui se passait. Il avait bien vu ses yeux blancs et sans vie qui ne pouvaient pas être les siens, pendant qu’elle essayait de le tuer. Il serait injuste qu’elle soit condamnée. De plus, il devait empêcher qu’un drame n’arrive. Tout cela était la faute de cette Noémie et de son complice. Il devait les arrêter.
Il arriva très rapidement au cirque et couru jusqu’aux loges. Il réveilla plusieurs monstres, jusqu’à tomber sur une loge où gisait le cadavre d’une femme nue. Elle avait été égorgée et sa chemise de nuit déchirée. Elle présentait également des traces sanglantes au niveau du pubis. Noha regarda son visage. Pas de doute, c’était Noémie. Comment cela était-il possible ? Noémie n’avait pas pu hypnotiser Auriane pour lui demander de la tuer, cela n’avait pas de sens…
Un cri, venant de l’extérieur, retentit. C’était le cri d’un homme. Noha sortit du chapiteau tandis que les monstres réveillés se précipitèrent autour de la dépouille de leur amie.

Je me ballade dans la nuit, du soir au matin, jetée dans le noir pour de noirs desseins. Mon âme est capturée et envoyée dans un endroit au delà de la conscience. Ça fait mal, mais je souris et je me sens libre.

« Calme-toi, Auriane, je ne te veux aucun mal ! » s’écria Anthony pendant que la jeune femme donnait des coups de hachoir dans le vide, au milieu de la nuit, près du chapiteau.
« Auriane ? » appela Noha en arrivant. « C’est moi ! Il faut que tu reprennes tes esprits. »
Mais la jeune femme ne semblait pas l’entendre. Elle n’avait plus rien d’humain et  grognait comme un animal sauvage. Noha se tourna vers Anthony.
- C’est toi qui l’a rendu comme ça, c’est de ta faute ! s’écria-t-il.
- Non, répondit Anthony. J’essayais seulement de l’aider.
- Tu es entré par effraction chez elle !
- Oui mais pour l’aider ! Je savais qu’elle était en danger, Noémie me l’avait dit ! Alors j’ai fait en sorte qu’elles se rencontrent pour qu’elle puisse la prévenir mais…
Auriane se jeta sur Anthony et lui planta le hachoir dans la poitrine. Le garçon poussa un gémissement et s’écroula pour rendre son dernier soupir.
La jeune femme se tourna alors vers Noha, arracha le hachoir du corps d’Anthony et se lança à la poursuite de son copain.
« Auriane, je sais que tu m’entends..Tu peux résister ! Reviens-moi ! »
Auriane ne semblait pas entendre ce qu’il disait. Elle réussi à rattraper le jeune homme et lui porta un premier coup au niveau de la jambe. Noha s’écroula par terre. Il ne restait qu’un coup à donner pour l’achever.
« Auriane… »
La jeune femme semblait hésiter.
« Auriane, je sais que tu ne vas pas me tuer…Sinon, tu l’aurais déjà fait ! Ça se serait passé comme dans ton rêve mais j’ai à peine été blessé. Alors je sais que la vraie Auriane est encore en toi ! Je sais qu’elle peut m’entendre ! »
Auriane semblait paniquer. Un duel intérieur paraissait exploser en elle. Prise d’une rage nouvelle, elle changea le hachoir de main et se donna nerveusement plusieurs coups à elle-même, sur son propre bras droit, jusqu’à le couper complètement. Noha hurla devant ce spectacle atroce.
L’étudiante hypnotisée reprit alors ses esprits, comme si la douleur avait le pouvoir de la ramener à la réalité.
« Auriane ? »

Chapitre 12 – Papa

Auriane ouvrit les yeux et reconnu sa chambre, puis les visages de son copain, de sa mère et…de son père. Ils avaient tous l’air affligés. Il y avait aussi un inconnu qui devait être médecin. Auriane voulu bouger et sa rendit alors compte qu’elle ne sentait plus son bras droit. Elle se souvint alors du rêve atroce qu’elle avait fait, et se rendit compte que tout était réel. Mais non…C’était impossible. Elle n’avait pas pu commettre des meurtres…Et elle ne pouvait pas avoir perdu un bras. Elle ne pourrait donc plus jamais manipuler ? Plus jamais vivre comme une personne normale ? Et sa vie, elle allait donc la passer en prison ?
Auriane éclata en sanglot avant que ses proches n’aient pu dire quoi que ce soit. Ils la regardèrent avec désolation.
« J’aimerais parler seul à seul avec ma fille…Pourriez-vous nous laisser cinq minutes, s’il vous plait ? » dit le père.
Tout les autres sortirent. Seul Myrtille resta sur les genoux de la jeune femme. Celle-ci n’appréciait guère l’idée de rester dans la même chambre que l’homme qui lui faisait peur depuis toujours.
- Alors ? Comment tu te sens ?
- J’ai connu mieux.
- Je comprend. Il y a quelque chose qu’il faut que tu saches, à propos de…
- Quoi ? Quoi ?! C’est toi qui est derrière tout ça, c’est ça ? C’est toi qui m’a fait faire toutes ces choses ? Nous avons suivi une fausse piste, j’ai tué deux innocents ! Maintenant, je ne vois que toi qui…
Deux yeux blancs. Ils ne venaient pas de l’obscurité, cette fois, mais des yeux de…Myrtille. Le chat regardait la jeune femme droit dans les yeux et ses deux pupilles blanches devinrent deux lumières éclatantes.
Alors…depuis le début…
La main gauche d’Auriane s’éleva toute seule et saisit la paire de ciseaux qui avait servit à bander son moignon. La jeune femme se leva en fixant son père.
« Non…Auriane…attends ! »

Chapitre 13 – Les yeux noirs
Auriane donna un grand coup de ciseaux qui fit une vilaine entaille sur la main du vieil homme. Lorsqu’elle s’apprêta à donner le coup de grâce, sa bouche laissa s’échapper un « NON ! » et elle se planta les ciseaux dans un oeil, puis dans l’autre.
Noir.
Auriane reprit alors ses esprits. La voilà aveugle, mais libre de toute hypnose. La jeune femme se sentit à la fois effondrée et soulagée.
- Auriane…tu as…
- Oui. Maintenant, débarrassons-nous de ce chat.
Quelqu’un toqua à la porte de la chambre. Puis, sans attendre de réponse, on défonça la porte.
Les monstres…

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Poèmes

lugubre

Bienvenue en enfer

Vous voilà plongé dans le plus sombre des jours,
Là où mon règne domine depuis toujours.
Là où l’espoir et mort et le bonheur pleure.
Suivez-moi avec docilité, n’ayez pas peur.

Vous avez été choisi parmi tant d’autres,
Par moi-même et mes plus fidèles apôtres,
Votre chair, votre âme, votre être, votre cœur
M’appartiennent dans ce monde de l’horreur.

Soyez confiant, vous n’êtes pas les premiers,
A me côtoyer dans l’Enfer des Hommes,
Plusieurs avant vous ont tenté de me renverser,
Je les ai écrasés de toutes mes forces sous ma paume.

Soyez donc obéissant envers votre nouveau maître
Ici, pas d’évêque, pas de Dieu, pas de Saint, pas de prêtre,
Seule la douleur vous tiendra compagnie dans la mort.
Votre soumission sera le Salut qui sauvera votre corps.

Les enfants des champs

Ecoutez attentivement, vous risquez de les manquer,
Ils sont pourtant bien là, ces petits trésors des champs,
Ces enfants de la nuit qui vous suivront toute l’année,
Qui vous observent cachés derrière le brouillard blanc.

Soyez prêt à les recevoir,
Ils sont impatients de vous voir,
Ils ne mordront que certains d’entre vous,
Seuls les moins chanceux saigneront jusqu’au cou.

Solitude
S’il existe bien une peine unique au monde,
Je crois que je sais à quoi elle ressemble.
Car je suis hélas à l’extérieur de la ronde,
Et devant moi, chacun d’eux tremble.

Leurs visages se crispent lorsque j’apparais,
Et leurs mots, tels des poignards, m’atteignent
Cependant, sachez qu’il y a un mais
Il n’y a que de l’extérieur que je saigne.

Silent Hill
Cette ville apparait dans mes rêves les plus agités
Et chaque soir, piégé dans les bras de Morphée
Je recherche désespérément la réponse
Comme capturé dans un mur de ronces.
Comment échapper à tel calvaire ?
Mes forces m’abandonnent, j’en suis vert
Le Mal autour de moi ne cesse de grandir
Tel un macabée à ressort, près à bondir.
Où se réfugier avec telle douleur ?
Afin d’échapper à ces intimes terreurs
Cette ville ne semble pas m’accorder la moindre répis
Et je la vois au cours de chaque nuit endormie
Oui, dans mes rêves les plus agités, je vois cette ville…
Silent Hill.

L’astre d’argent

Au dessus de nos têtes lourdes de pensées
S’élève l’éternel astre qui nous fait tant rêver.
Celui qui cache mille et un secrets
Et qu’aucun être n’a réussi à percer.
Renne de la nuit, elle s’élève dans le ciel
Et nous prions mille prières en dessous d’elle.
Cette déesse argentée que j’ai nommé la Lune,
Et que nous n’atteindrons pas même perché sur les dunes.

Blanche Colombe
Je te contemple allongée devant moi
Mes larmes, elles ne sont rien pour toi
Tu ne m’as jamais aimé tel que je l’ai fait
Voici donc une berceuse pour clore tes yeux
Mon amour pour toi est mon aveu
Je ne suis rien, tu ne peux être malheureuse
Toi, ma blanche colombe majestueuse.

Rivière d’amour
Je veux une rivière qui déborde d’amour
Même si ça ne suffit à combler mon cœur
Car je sais que les vides resteront toujours
Elle seule m’apporterait une goutte de bonheur

Mon cœur mielleux sait bien
Que seule la bonté comble son sein
Mais même si la douleur s’éteint,
Je sais que je n’aurai rien

J’ai besoin d’un miracle, pas de pitié sur les mains
Une seule goutte de Son cœur et en extase est le mien
Avec ce rêve qu’Elle m’envoie, j’entrevois bientôt ma fin
Je ne veux pas de charité, seul un miracle me convient.

J’ai laissé s’ouvrir les portes de l’Enfer.
Il l’a fait sous mes yeux, et je n’ai fait que l’observer.
Maître de son destin, il se jeta  avec un cœur léger
Dans le vide, faisant taire son âme à jamais.
J’étais présent, et je n’ai fait qu’observer.
Mais, je vous le demande, quel être
Aurait pu prévoir que la chute d’un prêtre
Se jetant dans le vide près du cimetière
Conduirait à l’ouverture des portes de l’Enfer ?
Car ce que ma sottise ignorait encore
C’est que cette mort scellerait le sort
De chacune de nos âmes damnées
Qui depuis ce soir là sont condamnées
A être traquées, pourchassées et assassinées
Par les démons anciennement faits de chair
Et dont l’âme s’est perdue en Enfer.
Désormais, c’est sur Terre qu’ils errent
Oh, pourquoi cet acte insensé, mon Père ?
Vous qui étiez si bon, vous en qui nous croyons
Vivez-vous les choses comme nous les vivons ?
Vous, qui avez laissé les morts revenir sur Terre,
Qui étiez vous réellement, entre deux prières ?

Le campagnard qui saignait
J’écris ces quelques lignes avant de plonger dans l’éternelle torpeur
Afin d’immortaliser la plus insoutenable des nuits de terreur.
Car alors que, persuadé d’être seul et paisible
Dans ma demeure isolée des absurdités de la ville,
J’entrai dans ma salle de bain comme chaque soir,
L’obscurité fit irruption et me plongea dans le noir.
Bien malin, je brandis déjà une torche  électrique
Calmant ainsi mon imagination paniquée
Distinguant bien vite des silhouettes fantomatiques.
Et soudain, devant mon miroir je restai figé
Car cet être ne pouvait être mon reflet.
Me faisant face, semblant appeler à l’aide
Se tenait mon propre cadavre ensanglanté.
Brandissant une main squelettique et laide
Cette chose me dévisageait de ses orbites creuses
Et je reconnaissais bien ma silhouette pieuse.
Oui ! C’était bien moi ! Mais de ce côté j’étais de sang
Horrifié, je restais sans voix devant cette apparition
Qui me pointait du doigt tout en crachant
Des litres de liquide rouge dégoulinant.
Puis, pour combler cette vision d’horreur s’offrant à moi,
Mon propre sang  se répandait sur chaque mur de la pièce
Tandis que de l’autre côté du miroir, cet autre moi
Se vidait tout en m’adressant un salut de politesse.
Au lieu de disparaître dans les ténèbres, il se figea
Et pour autant que je sache, il est toujours là.
Quant à ma demeure, elle ne représente plus rien
Pour moi, maintenant que les murs de sang ont été repeints.

Le journal du petit Albert.
Je m’appelle Albert Fish, et  j’ai 8 ans.
Je vis à la campagne, chez le frère de maman.
Parce que papa et maman ne sont jamais revenus.
Et tonton a dit qu’il s’occuperait de moi en attendant.
Mais jamais n’arrivait ce retour tant attendu.
Alors je reste là, et je joue avec les bêtes.
Puisque mon cousin George ne joue jamais avec moi.
Il est plus grand que moi, George, il a 13 ans.
C’est grâce à lui que j’ai appris que le monde était froid.
Que ce soit lui ou tonton, c’est toujours à moi qu’on s’en prend.
Et il y a aussi les copains de George, qui me lancent toujours des pierres.
Car il parait que je suis laid et que Dieu avait la tête ailleurs quand il m’a fait.
C’est ce que hurle toujours Tonton, quand il me voit jouer dans les prés.
Peut-être que si je n’aurais pas su leur faire face, si j’avais eu un grand frère.
Mais être seul m’a fait découvrir un art dans lequel j’excellais.
Celui de tuer.

La Rue
Que de monde, peu d’espace !
Dans cette immense rue commerciale,
Avec effort je m’y fraie une place
Au milieu des passants à l’allure bestiale.
Chaque jour, chaque soir, ils s’y empressent
Pour faire des achats ou lire les revues presse.
Quant à moi, je m’y fraie timidement un chemin,
Pour atteindre mon lieu de travail chaque matin.
Souvent on me bouscule, souvent je dois pousser
Si bien que je semblerais presque avoir l’air de danser.

Ce matin-là, à mon grand étonnement,
Un taxi m’interpella, me demandant :
« Mon bon monsieur, auriez-vous besoin d’une course ? »
Je remerciai sa gentillesse, mais lui répondis : « Aucunement. »
« Etes-vous sûr que vous n’avez besoin de rien ? » reprit-il aimablement
Je répliquai que oui, et lui demandai d’où lui venaient ces pensées si douces.
« C’est que je me suis dit que vous deviez avoir besoin d’aide
En vous observant déambuler au milieu d’une vieille rue vide. »

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Nouvelle – Nukekubis

Nukekubi
NUKEKUBIS

Enzo conduisait sa voiture avec le sentiment d’avoir fait du beau travail. Son coffre était plein, il ne restait plus qu’à jeter la marchandise. La radio passait la chanson « I want Love » d’Akira Yamaoka, et Enzo chantonnait l’air tout en conduisant avec prudence. Il ne lui restait que quelques bornes à faire pour arriver à destination – enfin. Il s’enfonçait de plus en plus dans la campagne, loin de la civilisation et des regards indiscrets. En effet, il était très important que personne ne le voit décharger sa voiture. Personne, absolument personne, ne devait savoir ce que contenait son coffre. Dans le cas contraire, il serait obligé de tuer la personne.
Quand il arriva enfin dans son coin secret, Enzo était mélancolique. Peut-être était-ce la chanson qui était passée à la radio qui lui faisait cet effet-là, peut-être commençait-il à développer un début de remors pour ses actes. qui sait…Il se gara près de la rivière, à une centaine de mètres de la maison abandonnée, et descendit de la voiture. Là, il ouvrit le coffre et sortit un premier corps de femme, emballé dans un sac de jute, comme tous les autres. Il se souvenait très bien du prenom de celle-là : Vanessa. Une belle salope, se dit-il. Comme toutes les autres. Oui, elles méritaient ce qu’Enzo leur avait fait. Il balança le corps de Vanessa dans la rivière et celui-ci coula à cause des cailloux qui étaient fourés dans le sac. Il s’attaqua alors à la deuxième, France. Enzo se souvenait très bien de France. Elle lui avait fait un strip-tease dans le club. Enzo l’avait ensuite éliminé discrètement dans les toilettes. Elle aussi finit dans la rivière, et ce fut la même chose pour les deux autres. Toutes les femmes qu’Enzo avait tué se trouvaient au fond de l’eau. C’était sa cachette secrète, et jusqu’à présent, personne ne semblait s’en douter. Il ne lui restait plus qu’à rentrer chez lui et à aller se coucher. Il faisait bientôt nuit.
Mais cette fois, Enzo ignorait qu’il ne rentrerait pas chez lui. Alors qu’il s’apprêtait à regagner sa voiture, il sursauta en apercevant une femme qui le regardait, sur le pallier de la maison abandonnée. C’était une femme plutôt jeune, habillée d’une robe blanche,  et aux cheveux noirs. Elle était trop loin d’Enzo pour que ce dernier puisse l’identifier mais il trouva qu’elle ressemblait beaucoup à France. Mais il y avait quelque chose d’étrange avec cette femme, Enzo n’arrivait pas à identifier ce que c’était. Quoiqu’il en soit, elle avait certainement vu ce qu’Enzo avait fait dans la rivière, et il ne devait pas laisser le moindre témoin en vie. Pas questions pour lui de finir ses jours en prison !
Enzo n’eut pas le temps d’attraper son canif que déjà, l’étrange femme ressemblant à France tourna les talons et entra dans la maison abandonnée. Enzo saisit donc son arme blanche et courru vers l’entrée de la maison. C’était une grande villa qui avait certainement appartenu à quelqu’une de riche, mais elle n’était plus que l’ombre d’elle-même. Les carreaux étaient brisés, des graffitis recouvraient les murs et tout était vieux et décrépit. Enzo pénétra dans la maison avec hésitation. Cette endroit filait la chair de poule, mais c’était avant tout cette témoin qu’il ne devait pas laisser filer.
L’intérieur de la maison ressemblait à l’extérieur : vieux, usé, dégradé, des tags partout. Certains tags étaient d’ailleurs très explicites : « Chambre des fous », « Le diable t’emportera », « Chaque histoire se termine par la mort », pouvait-on lire. Il commençait à faire très sombre, mais, fort heureusement, Enzo avait pensé à prendre sa lampe torche. Au moment de l’allumer, Enzo se rendit compte de ce qu’il y avait  de bizarre avec la femme qu’il avait apperçu : on voyait au travers. Elle était transparante. Enzo se dit immédiatement qu’il avait dû rêver, que ce genre de choses était impossible. Pourtant…
Enzo s’aventura discrètement dans la villa, évitant les toiles d’araignée et les cafards qui se baladaient par terre et sur les murs. Le faisceau de sa lampe de poche faisait danser la rampe de l’escalier qu’Enzo emprunta en se disant que cette mystérieuse femme avait dû monter à l’étage. Tout de même…elle ressemblait énormément à France.
Lorsqu’il atteint la premier étage, son rayon de lumière rencontra quelque chose qui alla aussitôt se cacher. Ce n’était pas un être humain, mais un animal volant (un oiseau ? Une chauve-souris ?). Enzo n’eut pas le temps de voir ce que c’était, mais il aurait juré que ça ressemblait à une tête humaine qui volait toute seule. Il se dit que son imagination lui jouait des tours et avança, toujours avec discrétion, le couteau dans une main, la lampe dans l’autre. Son rythme cardiaque commençait à s’accélerer, probablement à cause de l’aspect lugubre de l’endroit. C’est alors qu’une chose épouventable lui arriva : la lampe s’éteignit.
« Merde…les piles ! » dit Enzo à haute voix, oubliant sa discrétion.
Il faisait désormais entièrement nuit. Une nuit sans lune. Comme alertées par l’extinction de la lampe, des voix féminines se mirent à retentir dans la maison, autour d’Enzo. Des voix qui prononçaient des paroles incompréhensibles.
« Y’a quelqu’un ? » demanda Enzo.
Les voix cessèrent un instant puis recommencèrent. Enzo ne pouvait plus le cacher : il avait peur. Il fit demi-tour pour retrouver l’escalier et redescendre les marches afin de sortir de cette maison de fou, mais rien à faire : il s’était perdu dans la maison. Il n’avait aucune idée d’où il était venu ni d’où il allait. Il longea à l’aveuglette ce qui sembla être un couloir puis sa main tomba sur une porte, qu’il ouvrit. Au moment d’entrer dans la pièce, il sentit une étrange force le pousser vers l’intérieur, et quelque chose passa à côté de lui en volant. Il en était certain. La chose avait murmuré quelque chose dans une langue étrange. Finalement, il décida de ressortir de la pièce. Ses yeux commençaient à s’habituer à l’obscurité et il distinguait maintenant à peu près le décor qui l’entourait. Il s’avança jusqu’à la porte au bout du couloir, mais celle-ci était fermée. Il fit demi-tour et c’est alors qu’il la vit pour de bon. Une tête de femme – celle de Vanessa ? Elle y ressemblait, mais il faisait trop sombre pour en être certain – flottait dans l’air devant lui, à l’autre bout du couloir. Elle avait de longs cheveux noirs et ses yeux jaunes brillaient dans les ténèbres. Enzo se retrouva sans voix. Ce qu’il avait sous les yeux étaient impossible. Ce genre de choses n’existait pas. Pourtant, il ne rêvait pas. La tête de Vanessa flottait toute seule devant lui. Soudain, elle fonça sur lui en exibant de longues dents pointues, toutes blanches. Enzo cria et se baissa pour éviter la morsure de la tête fantomatique. Celle-ci le rata de peu et passa à travers la porte fermée. Enzo hurla de terreur. Son esprit était confus, mais il se souvint avoir lu un article sur une légende à propos de fantômes de femme qui se manifestaient sous la forme de têtes seules et qui suçaient le sang de leurs victimes. Il lui sembla que ça s’appelaiot des Nukekubis. Enzo avait alors prit cela pour des foutaises, mais ce qui l’avait attaqué était bien réel. Et ces voix qui retentissaient…ces voix. Elles semblaient de plus en plus proches. Elles semblaient encercler Enzo. Pris dans un excès de panique, Enzo oublia totalement la raison de sa venue dans la villa et courru à l’aveuglette jusqu’à se cogner contre un mur. A ce moment-là, les murmures se transformèrent en rire. En levant la tête, Enzo apperçu quatre têtes flottantes, qui avaient chacune les traits d’une des victimes qu’il avait plongée dans la rivière. Enzo poussa un cri hystérique. Les quatre têtes fondirent sur lui et Enzo les évita de peu. Il retrouva enfin l’escalier et le descendit aussi vite qu’il le pu. C’est une fois arrivé à la dernière marche que le sol sous ses pieds s’effondra et qu’il fit une chute le menant tout droit à l’étage en dessous.
Lorsqu’Enzo se réveilla, il cru pendant un instant avoir rêvé toute cette histoire. Une partie de lui s’attarda à l’espoir que ces créatures fantomatiques n’avaient été que le fruit de son imagination. Cependant, la douleur à sa jambe droite lui rappela qu’il était toujours dans la villa abandonné où il s’était fait attaquer par les têtes flottantes. Il mit quelques minutes à réalisé ce qui s’était passé : le sol s’était effondré sous son pied et le voilà à présent dans la cave de la villa. Il s’était probablement brisé la jambe en tombant. Il vit une petite chauve-souris et distingua, malgré l’obscurité, d’étranges boîtes de conserve qui semblaient contenir des têtes de femme. Ce n’est qu’au bout de plusieurs minutes qu’il s’aperçut que des choses étaient en mouvement sur le plafond de la cave. Enzo plissa les yeux et se rendit compte qu’ils s’agissaient de gigantesques blattes de plus de 50 cm de longs. Leur corps étaient immobiles, seules leurs anteines bougeaient dans tous les sens. Mais le plus incroyable avec ces cafards géants, c’était qu’ils avaient le visage des victimes d’Enzo. Il reconnu Vanessa, France, et les autres. Elles semblaient se parler entre elles, toujours dans la même langue incompréhensible. Au delà de la panique, sous l’emprise de la peur, Enzo éclata de rire.
Depuis, plusieurs personnes disent avoir apperçu les Nukekubis d’Enzo dans la villa abandonnée.

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Nouvelle – pluie glacée

pluie

PLUIE GLACEE

C’est par un après-midi particulièrement pluvieux que François se dirigeait vers son nouveau lieu de travail pour la première fois, afin d’être formé. Il avait réussi à trouver ce job d’été dans un fast-food récemment implanté à Aixe-sur-Vienne, la ville voisine de celle où il habitait. Ce n’est pas sans une certaine appréhension que François allait entamé son premier jour de travail. Tous les autres jobs d’été qu’il avait eu avaient été des expériences particulièrement éprouvantes pour une personne comme lui, qui n’avait jamais été très manuel. En effet, à 22 ans, François avait toujours été premier de sa classe à l’école et excellait sans effort dans la théorie. En revanche, la pratique était une autre histoire. Il était en effet plutôt maladroit, peu débrouillard et pas très rapide. Cela lui avait valu d’être mal vu par l’ensemble de ses collègues, que ce soit dans la restauration, dans la boulangerie ou en grande surface. Pour la première fois, François allait travailler dans un fast-food, et il savait que cela demanderait de la vitesse d’exécution et de la débrouillardise. Qu’allaient dire ses collègues quand ils s’apercevront qu’il n’est pas très doué ? François angoissait à cause de cela.
C’est donc sous des cordes de pluie qu’il se gara, descendit de sa voiture et couru jusqu’à l’entrée de son nouveau lieu de travail. En entrant, il demanda à voir Déborah, la manager. Celle-ci arriva au bout de plusieurs minutes, le salua, et lui demanda de la suivre. Elle lui expliqua alors la plupart des choses qu’il avait besoin de savoir pour travailler (où était le stock de nourriture, comment faire les différents types de glace, comment couper des tomates, comment nettoyer le lobby, la partie du restaurant où les clients mangent, etc). François se dit qu’il serait difficile de retenir toutes ces informations sans se tromper et fit de son mieux pour retenir le plus de choses possibles. Il essaya au mieux d’être le moins maladroit possible lorsque Déborah – qui n’avait pas l’air de rigoler souvent – et ses collègues le regardaient faire. Les collègues, quant à eux, lui paraissaient plutôt sympathique. Il y avait Eléa, une jeune fille métisse au large sourire, très gentille, que François semblait faire rire souvent, Camille, une jeune blonde qui souriait moins mais qui avait l’air tout aussi gentille, Célia, une jolie brune, Lauriane, une fille qui ne souriait jamais mais qui n’avait pas l’air bien méchante, Marie, une jeune femme qui ne souriait jamais non plus et qui avait l’air plutôt sévère et du côté des garçons, François ne retint que le prénom de Paul, le frère d’une de ses amies d’enfance. François remarqua, au bout de quelques jours, qu’il ne s’était jamais aussi bien entendu avec l’équipe. A part Marie, qui était très exigente avec lui et qui semblait ne pas l’appréciait et Déborah qui se contentait de lui donner des ordres, tout le monde semblait apprécier le petit nouveau, si bien que cela paraissait bizarre à François. Pourquoi étaient-ils si aimables alors que, jusqu’à présent, François ne s’était jamais bien intégré dans un groupe ? Le jeune homme se posait ce genre de questions en travaillant. Chaque jour, il n’espérait qu’une chose, être au Service à Table (SAT). Il adorait apporter les plateaux aux clients et s’occuper de  la propreté du lobby. Son travail consistait à changer les poubelles, nettoyer les tables, passer la balayette sur le sol, rapporter les plateaux à la plonge, ramasser tout ce qui trainait, et enfin apporter les commandes. François trouvait cela bien plus simple que de préparer les commandes au comptoir à une vitesse folle. Heureusement, Déborah l’avait bien compris, et pratiquement chaque jour, François se retrouvait au SAT. C’était devenu une convention, si bien que ses collègues avaient prit l’habitude de l’appeler à chaque fois qu’une commande était prête. François lâchait alors son chiffon ou sa balayette se se précipitait pour apporter la commande aux clients.
Tout semblait se passer pour le mieux pour François, qui avait finalement trouvé son meilleur job d’été. Il y avait cependant deux détails qui le laissait perplexe. Le premier, c’était l’hatitude étrange de ses collègues, qui le regardaient parfois bizarrement, comme s’ils attendaient quelque chose de lui. La deuxième était le fait que, bien que nous étions en plein mois de Juillet, il pleuvait assez souvent depuis qu’il avait commençait à travailler. En fait, il pleuvait presque tous les jours où il travaillait et beaucoup moins lors de ses jours de congé (le jeudi et le vendredi). François, qui était un étudiant scientifique dans l’âme, n’expliquait pas ce phénomène et cru plutôt à une coïncidence. Le plus étrange était que l’eau de pluie était étonnamment froide et semblait sortir tout  droit de l’automne. Quant aux collègues, ils semblaient ne pas y faire attention.
C’est un mercredi soir que François assista à quelque chose auquel il n’aurait pas dû assister. Alors qu’il était minuit et qu’il allait débaucher, il entendit malgré lui un bout de conversation entre Eléa et Lauriane. Cette conversation l’intrigua.
- Tout est prêt ? demanda Lauriane à Eléa.
- Ne t’inquiète pas, Déborah à tout prévu. Le sacrifice se fera dans les temps.
- Je vais me préparer.
- Et François ?
- Déborah a dit la semaine prochaine.
Les deux filles, qui n’avaient pas remarqué la présence de François, disparurent dans la cuisine. François décida de les suivre discrètement. Il se cacha derrière le comptoir et observa. Lauriane et Eléa s’y prirent à deux pour bouger un réfrigérateur qui cachait une porte. Eléa sorti une clef de sa poche et ouvrit la porte. François sorti de sa cachette et essaya d’ouvrir la porte, le plus discrètement possible. Hélas, les filles avaient fermé derrière elles. François ne savait plus s’il devait rentrer chez lui ou essayer d’en savoir plus. Une voix dans sa tête lui soufflait de s’en aller pendant qu’il en était encore temps, mais sa curiosité le forçait à écouter à la porte. Pendant cinq minutes, il n’entendit rien. Au bout d’un moment, il entendit une mélodie venant probablement d’une sorte de tambour, puis une sorte d’instrument à vent qu’il n’identifia pas. Il entendit alors d’étranges paroles prodiguées dans une langue qui lui était inconnue, mais qui se firent entendre de plus en plus fort. C’est alors que résonna un effroyable cri qui ressemblait beaucoup à la voix de Marie, la collègue qui ne l’aimait pas. Puis, plus rien. Rien pendant 5 minutes. François sentit que quelqu’un s’approchait de la porte et allait l’ouvrir. Il se précipita hors du restaurant et alla se cacher dans sa voiture. Il se rendit compte que si les collègues voyaient sa voiture, ils saurait qu’il était resté. François démarra aussi vite qu’il le pu et quitta les lieux. Que venait-il d’entendre ? Lauriane et Eléa avait parlé de sacrifice…se pourrait-il que…? Non, ça ne pouvait pas être vrai. Pourtant, ce cri…Il avait peut-être rêvé toute cette histoire…et pourtant, non.

Les deux jours qui suivirent étaient les jours de congé de François, mais il ne pu s’empêcher d’aller au restaurant pour savoir comment allait Marie. Il ignora la pluie et entra dans le fast-food tout trempé. Lauriane lui dit que Marie était en congé, ce qui ne surprit guère François. Il prit un petit menu pour cacher ses véritables intentions qui étaient de vérifier si Marie était bien là. Il se força à manger bien qu’il n’ait pas faim, puis parti. Une fois chez lui, il entrepris de faire quelques recherches sur ses collègues…avant de se rendre compte qu’il ne connaissait aucun nom de famille. Il fit alors une recherche sur le restaurant en lui-même, et découvrit une information intéressante : avant la l’implantation de celui-ci, le bâtiment était un lieu de culte religieux dirigé par une secte appelée le Renouveau. François ne trouva que très peu d’informations sur cette secte, mais il semblait qu’elle vénérait une sorte de Diable et que, chaque mois, un rituel était organisé en l’honneur de cette entité. Malgré ses recherches approfondies, François n’en su pas plus.

Un deuxième jour passa et François ne cessait de cogiter. Une infime partie de lui refusait de croire en ce qu’il avait entendu mais il ne pouvait que se rendre à l’évidence : ses collègues avaient sacrifié Marie en l’honneur de leur Diable adoré. Et peut-être serait-il le prochain…François pensait démissionner, mais il décida d’en savoir plus. Le lendemain, il demanda donc à Déborah ce qu’il savait déjà :
- C’était quoi, ce bâtiment, avant ?
- Je ne sais pas, je ne suis arrivé qu’il y a 3 ans.
- J’ai entendu dire qu’il y avait une sorte de secte…
- Jamais entendu parler.
Après la conversation, François se rendit compte qu’il venait de faire une erreur grave.
« Quel idiot ! » s’exclama-t-il à voix basse pendant qu’il nettoyait une table. Maintenant qu’il avait parlé de la secte, ils allaient se rendre compte qu’il savait quelque chose. Il venait peut-être de signer son arrêt de mort… Déborah lui avait lancé un étrange regard lorsqu’il avait parlé de la secte. Elle ne sembla pas cependant en avoir parlé aux collègues car ceux-ci avaient toujours la même attitude vis-à-vis de lui. Une attitude trop sympathique, trop aimable.
François alla s’adresser à la fille dont il se sentait le plus proche, Eléa, et lui posa la question suivante :
- Marie est en congé, c’est ça ?
- C’est ce qu’on m’a dit, oui, depuis avant-hier.
- Quand reviendra-t-elle ?
- Ça je ne sais pas, il faut demander à Déborah.
Elle savait visiblement quelque chose, ça se voyait dans ses yeux. Après tout, c’était elle qui avait parlé avec Lauriane de cette histoire de sacrifice. François pensait qu’il était temps de démissioner avant d’être le prochain sur la liste. Il chercha Déborah du regard mais elle semblait introuvable. Il alla donc la trouver dans le bureau des managers.
- Que veux-tu ? demanda-t-elle.
- Je me demandais si je pouvais…arrêter là.
- Arrêter quoi ? répondit-elle avec agacement.
- Mon contrat. J’aimerais partir.
Déborah le regarda comme si elle venait de comprendre qu’il savait tout. François se dit qu’il venait de se faire griller en beauté.
« Et pourquoi ça ? » demanda Déborah.
François trouva rapidement un mensonge à dire.
- J’aimerais consacrer mon temps libre à la préparation de ma licence pour la rentrée.
- Vraiment ? Eh bien, si c’est ce que tu veux, nous mettrons fin à ton contrat dès aujourd’hui. Je suppose que tu ne vois pas d’inconvénient à finir la journée.
François y voyait effectivement un inconvénient, mais se tut. Il reprit le travail jusqu’à 19h, l’heure  de sa pause. Au moment de « dépointer » (c’est à dire de passer sa carte pour signaler que l’on va en pause), Déborah lui demanda de la rejoindre dans son bureau. François accepta avec appréhension. Cette appréhension était justifiée car dès lors qu’il entra dans le bureau, il senti une forte douleur derrière sa tête…puis, plus rien.
Ce fut le contact des goutelettes de pluie gelée qui réveilla François. Il se rendit vite compte, en essayant de bouger ses mains, qu’il était attaché à une chaine, à l’extérieur du restaurant. Il ouvrit les yeux et vit qu’il était sur le parking du fast-food. Il n’y avait plus aucune voiture et François en déduit qu’il était tard dans la nuit. Autour de lui, tous ses collègues étaient rassemblés, avec une vieille femme que François n’avait jamais vu et qui était habillée d’une robe de cérémonie rouge. Déborah portait la même robe, mais bleue et les autres collègues portaient une robe cérémoniale un peu différente qui était noire. Aux pieds de chacun, se trouvait un masque blanc avec seulement deux petits trous pour les yeux. Lorsque la vieille leva son unique bras (l’autre s’arrêtait au coude), tout le monde mit son masque sur le visage, excepté la vieille. Celle-ci s’avança vers François (car elle était en face de lui), et l’observa sans dire mot. Elle était d’une laideur épouvantable. Elle ouvrit la bouche, d’où sortit un liquide verdâtre, puis vomit une quantité astronomique de bile sur François qui hurla de dégoût et de douleur (le vomi était en effet très chaud). Tous les autres prononcèrent un mot incompréhensible pour François (du latin ?) et la vieille femme se recula. Déborah prit la parole :
« Il aura fallu que tu creuses jusqu’au bout. Nous ne voulions pas te sacrifier tout de suite, mais ton heure a sonné. Adieu. »
Tous les collègues prononcèrent, de manière répétée, une phrase dans cette même langue inconnue à François, puis la vieille dame sorti de sa robe une patte d’animal (une patte de poulet ?) et la brula avec une allumette. Tout en continuant de répéter leur phrase, tous les collègues ainsi que la vieille s’avancèrent vers François qui hurlait « Au secour ! ». La pluie se faisait de plus en plus torentielle et François avait l’impression qu’elle était de plus en plus froide. Chaque collègue sortit un couteau de leurs robes et la vieille sorti une hache. François eu le temps d’émettre un dernier souhait…que ça se termine au plus vite.

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Nouvelle – Les choses de la cave

cave

LES CHOSES DE LA CAVE

Alfonse se disait ce soir-là qu’il avait fini par s’habituer à la solitude. Depuis la mort de sa femme et de son fils de 10 ans, il s’était abstenu de garder tout contact avec le monde extérieur, y compris ses voisins à qui il refusait de parler. Pourquoi vouloir créer des liens si c’est pour souffrir ? On est plus heureux tout seul, telle était sa philosophie. Ce soir, il venait de terminer une maquette de squelette de dinosaure – les maquettes étaient son passe-temps depuis qu’il était seul. Il en était plutôt fier. Il alla ensuite se servir un verre d’eau. Il ne buvait pratiquement plus que des verres d’eau depuis qu’il était seul à occuper la maison. La mort de ses proches avait au moins eu le mérite de lui faire arrêter l’alcool. La sonnette de sa porte d’entrée retentit. Alfonse détestait quand cela arrivait…Ne pouvait-on pas le laisser tranquille ? Il regarda par le judas. C’étaient ces satanés voisins. Que voulaient-ils encore ? Alfonse envisagea d’abord de feindre son absence, mais il se dit que les voisins l’avaient probablement entendu s’approcher de la porte. De plus, il était légèrement curieux de savoir ce qu’ils voulaient. Il ouvrit. C’était un couple. L’homme, Martin, avait la trentaine et était plutôt beau gosse. Sa femme, Marie, devait avoir 25 ans et était également séduisante. Alfonse jalousait leur jeunesse et leur beauté.
- Bonjour monsieur Beaudard dit Martin.
- C’est pour quoi ? demanda froidement Alfonse.
C’est Marie qui répondit :
- Alors voilà, nous savons que vous venez de traverser une épreuve difficile, et nous aimerions vous aider d’une manière ou d’une autre. Alors voilà ce que nous pro…
- Je n’ai pas besoin d’aide ! rétorqua Alfonse en claquant la porte.
Il observa le couple s’éloigner par le judas. C’était un monde tout de même, il leur avait déjà dit la semaine précédente qu’ils préféraient être seul.
La nuit tombait. Alfonse regarda la télévision pendant une petite heure et parti se coucher. Il vivait dans une grande maison en pleine campagne. Cela lui convenait parfaitement. Il ne pouvait pas rêver un meilleur isolement. Le seul nuage était ces voisins pénibles qui ne pouvaient pas s’occuper de leurs affaires.
Alors qu’il s’apprêtait à s’endormir, Alfonse entendit une vibration sur sa table de chevet. C’était son téléphone portable. Qui pouvait bien lui envoyer un sms à minuit ? Il saisit l’objet et plissa les yeux pour déchiffrer le message qu’il venait de recevoir. Il parvint à lire « Je t’attends dans la cave. ». Alfonse mit quelques secondes avant de réaliser que la personne qui lui avait envoyé ce message était…sa femme décédée. Il regarda longuement le nom inscrit au dessus du sms, c’était bien celui de Sonia. Alfonce fronça les sourcils et reposa le téléphone, se disant qu’il s’agissait d’une blague de la part de quelqu’un assez doué pour pirater les téléphones. Cela ne pouvait être que ça…quoi d’autre ?
Il entreprit de s’endormir, mais environ un quart d’heure plus tard, le téléphone vibra à nouveau. « Je t’attends dans la cave. ». L’expéditeur était cette fois-ci son fils. Alfonse s’avoua à lui-même qu’il ne comprenait pas tout ce qui était en train de se passer. Il se leva et, sans trop savoir ce qui le poussait à le faire, alla se munir d’une lampe de poche et ouvrit la porte de la cave. Il descendit lentement les escaliers, éclairé par le faible rayon de sa lampe, puis le promena autour de lui afin d’essayer de distinguer quelque chose. Il n’y avait que de vieilles affaires mal rangées, reposant sur une épaisse couche de poussière au milieu de toiles d’araignées. Rien de plus.
Alfonse entreprit de remonter dans la salle à manger lorsqu’il cru voir une ombre passer à toute vitesse devant le faisceau de sa lumière, devant le berceau qui avait été celui de son fils et qui moisissait maintenant dans la cave. Il se dit immédiatement que son imagination lui jouait des tours et, préférant ne pas en savoir plus, il remonta les escaliers. Sur la dernière marche avant d’atteindre la salle à manger, se trouvait un lapin en peluche. Afonse reconnu immédiatement celui de son fils quand il était petit. Il était persuadé que cette peluche n’était pas là quand il était descendu dans la cave, quelques minutes avant. Alors, que faisait-il ici ? Le mystère restait entier. Il prit la peluche sous son bras, sortit de la cave et s’assura de bien en fermer la porte. Il decida d’aller se servir un verre d’alcool. Il savait que ce n’était pas une bonne idée, mais il avait besoin de se détendre après ce qu’il venait de vivre. Ce qui venait de se passer était tout simplement impossible, et il le savait. Il n’avait pas pu voir cette ombre qui ressemblait à la silhouette de sa femme, ni cette peluche qui était celle de son fils. Pourtant, elle était bien dans sa main.
Alfonse se servit un verre de rhum qu’il mélangea avec du sucre et un morceau de citron et le bu rapidement. Il alla alors à nouveau se coucher mais entreprit de vérifier son portable avant. Pas de message. Il s’en retrouva soulagé, mais impossible de faire taire cette angoisse qui naissait en lui. Impossible, donc, de s’endormir. Au bout d’une heure, il entendit quelqu’un toquer à une porte. Qui cela pouvait-il être à une heure pareille ? Il se leva, et se dirigea vers la porte d’entrée lorsque les coups retentir à nouveau et Alfonse se rendit compte qu’ils ne venaient pas de la porte d’entrée mais de la porte de la cave. Il resta pétrifié lorsque les toquements se firent à nouveau entendre, plus fort. Il ouvrit la porte de la cave, et descendit à nouveau les escaliers. Rien. Si…le berceau semblait avoir légèrement changé de place, comme si quelqu’un l’avait bougé. C’est alors que pendant un instant très bref – pas plus d’une seconde – Alfonse cru voir sa femme en robe blanche, en train de bercer un bébé dans le berceau. Elle avait les yeux entièrement noirs et sa peau était aussi pâle que celle d’un vampire. Alfonse n’eut pas le temps de distinguer ce qu’il y avait dans le berceau, tant l’hallucination – car ça ne pouvait être que ça – fut brève. Il remonta les marches de la cave en courant et ferma la porte à clef. Il commença tout juste à réaliser qu’il avait peut-être vu des fantômes, ou alors, peut-être devenait-il fou. L’un ou l’autre.
Il retourna dans sa chambre pour regarder son portable. Deux messages. Le même message de la part de sa femme et de son fils : « Nous t’attendons. » Alfonse se demanda un instant s’il ne devait pas appeler la police, mais s’y résigna aussitôt. Que pouvait-il leur dire ? Que sa famille décédée lui envoyait des messages et l’attendait dans sa cave ? Lorsqu’il retourna dans sa cuisine pour se servir un autre verre, il passa devant la photo de famille et se rendit compte que quelque chose avait changé. Lui était intact mais sa femme et son fils ressemblaient désormais à des cadavres en putréfaction, avec les yeux entièrement noirs. Alfonse cacha la photo et tenta de reprendre ses esprits. On toqua de nouveau à la porte de la cave, mais Alfonse n’ouvrit pas. C’est alors que la voix de sa femme retentit dans l’air. « Ouvre la porte », murmurait-elle. « Oui, papa, ouvre la porte de la cave. » fit ensuite la petite voix aigue de son fils.
« Laissez-moi tranquille ! » criait Alfonse. « Je ne veux pas ! ». Les voix étaient en train de l’appeler « Alfonse…Papa…Alfonse… »
C’est alors qu’Alfonse distingua la silhouette de sa femme et de son fils à travers la porte de la cave. Il aurait reconnu ces silhouettes entre mille. Elles se tenaient par la main. Les voix se faisaient toujours entendre. Quant à la photo de famille, elle s’était remise droite toute seule et la femme et le fils d’Alfonse ressemblait toujours à des cadavres vivants. Cette fois-ci, cependant, la photo semblait saigner. Du sang en coulait abondamment et se répendait sur le meuble sur lequelle elle était posée.
En proix au désarroi et à la terreur, Alfonse finit par ouvrir la porte de la cave. En haut des marches, se trouvaient Valérie, la femme d’Alfonse et Anthony, son fils. Tous deux ressemblaient à des cadavres vivants, dévorés par des vers qui avaient formé une colonie dans leurs orbites et qui tombaient de leurs bouches. Alfonse distingua également quelques cafards courant sur leurs corps.
« Tu as assez souffert comme ça, Alfonse, il est temps de nous rejoindre. »

EPILOGUE
Le lendemain, les voisins Marie et Martin toquèrent à la porte d’entrée d’Alfonse mais celui-ci ne répondit pas. Personne ne répondit. Il n’y avait plus personne dans la maison. Il y avait cependant une photo de famille. Elle représentait trois cadavres le sourire aux lèvres.

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Nouvelle – Mère de larmes

mère

Mère de larmes
1
Harry se sentait d’une humeur mélancolique, ce soir. Cela faisait déjà trois heures – d’après sa montre – qu’il avait fugué de chez sa mère pour se ballader au bord de la mer et il n’éprouvait toujours pas le moindre regret. Il faut dire que sa mère lui en avait fait voir des vertes et des pas mûres. Pendant des années, elle n’avait cessé de lui mentir sur tellement de choses, de le faire voler des choses au supermarché du coin, de la gater inlassablement comme pour acheter son amour et bien d’autres choses dont Harry ne garde que de vagues souvenirs, qui pourrissent au fil du temps. Ce soir-là, ce fut la fois de trop. Harry était tombé par inadvertance sur des photos assez particulières en consultant l’ordinateur de sa mère. Des photos d’elle. Nue. En plein ébat amoureux. Harry n’aurait jamais imaginé que le fait de voir sa mère faire l’amour provoque chez lui un tel sentiment de dégoût, mêlé à une rage profonde. Cette fois, c’en était trop. La dernière fois qu’Harry avait voulu fuguer, c’était après avoir vu une photo de sa soeur de quatre ans nue avec les mots « Un rendez-vous pour l’amour » écrit au dessus d’elle, sur le blog de sa mère. Comment une femme pouvait-elle faire ça à son enfant ? Harry se le demandait encore.
Alors qu’il se promenait, seul, devant l’immensité de l’eau, Harry songeait à ce qu’était finalement une mère. Une vraie mère. Pouvait-on tout lui pardonner sous prétexte qu’elle nous avait porté et mis au monde ? Harry commençait à en douter. Pour lui, il était clair que la femme qui lui avait donné la vie n’était pas sa mère. Pour lui, il n’avait pas de mère.
Harry s’arrêta de marcher et contempla la mer. Il mourrait d’envie de sauter dedans et de s’abandonner aux plaisirs de la baignade. Cependant, il se voyait mal rentrer avec ses vêtements tous trempés. De plus, elle devait être froide à cette heure-ci.
« Tu lui en veux, n’est-ce pas ? »
Cette voix…Harry l’avait déjà entendu quelque part, mais impossible de se souvenir où. Il se retourna, et vit un grand homme habillé d’un long manteau noir et d’une capuche lui cachant le visage – même si on aurait pu le distinguer s’il ne faisait pas si sombre.
- C’est à moi que vous parlez, monsieur ? demanda Harry.
- C’est à toi que je parle. C’est ton père qui m’envoit.
Harry n’avait pas eu de nouvelle de son père depuis qu’il avait 7 ans, lorsqu’il était partit.
- Mon père ? Comment ça ?
- Peu importe. Je suis là pour t’offrir la possibilité de te venger de celle qui est responsable de tous tes tracas.
- Je ne comprend rien à ce que vous me racontez.
- C’est pas grave. Tu n’as pas besoin de comprendre. Tu as juste besoin de lire ces mots à haute voix.
L’homme au manteau tandis à Harry un petit papier rouge. Harry le saisit et, malgré l’obscurité, parvint à lire ce qu’il y avait d’écrit.
- C’est du charabia, non ?
- Si on veut.
- Et qu’est-ce que vous voulez que j’en fasse ?
- Je veux que tu rentres chez toi et que tu prononces ces mots à haute voix devant ta mère. Tu comprendras à ce moment-là.
C’est alors que l’homme au manteau tourna les talons et s’éloigna d’Harry. Harry le vit s’éloigner puis…il avait comme disparu. Harry se dit que c’était l’obscurité qui donnait cette impression, que les gens ne pouvaient pas disparaitre comme par magie, mais cette façon de s’en aller le laissa perplexe. Il hésita à jeter le papier dans l’eau. Après tout, ce ne devait être que de belles foutaises, prodigué par un malade mental. Pourtant, comment expliquer qu’il savait qu’Harry en voulait à sa mère ? Connaissait-il cet homme ? C’est ton père qui m’envoit.
Harry décida finalement de ranger le papier rouge dans sa poche et de rentrer chez lui. Il ne croyait pas aux sornettes prodiguées par l’homme au manteau, mais une partie de lui avait envie de savoir…de vérifier.

2
La mère d’Harry était endormie lorsque ce dernier rentra dans la maison (Harry se dit que sa fugue ne l’avait donc pas inquiété plus que ça). Sa soeur aussi, visiblement. Harry avait avait envie d’en faire autant, mais une autre envie se cachait en lui. Il fallait qu’il essaye. Il fallait qu’il sache. Il fallait qu’il lise les mots à haute voix. Que risquait-il ? Il y avait 99% de chances que rien ne se passe…mais qui sait…peut-être la magie existait-t-elle, après tout. Il n’y avait rien à perdre. Après quelques secondes d’hésitation, il entra dans discrètement dans la chambre de sa mère, sans la réveiller. Il sortit le papier rouge de sa poche, et il lu à haute voix :
« Mori cupio est »
Comme Harry s’y attendait, rien ne se passa. Sa mère dormait toujours d’un sommeil profond, au point que les trois mots prononcés à voix haute ne l’avaient pas réveillée. Le jeune homme quitta la chambre et jeta le papier rouge à la poubelle. Il regarda la télévision pendant une petite heure – ils rediffusaient des sketchs des Inconnus – puis alla se coucher.
Il mit plusieurs heures avant de s’endormir. Sa nuit fut hantée de plusieurs cauchemars durant lesquels il vit une énorme bête féline roder dans sa maison, prête à bondir sur tout ce qui bougeait. Plus gros qu’un tigre, plus svelte qu’un guépard. Une créature d’outre-tombe.
Le lendemain, Harry ne réveilla pas avant 13 heures. Le souvenir de ses rêves monstrueux était flou mais il visualisait pourtant très bien le fauve. Il sortit de son lit, alla dans la cuisine et fut surpris de constater que sa mère n’avait pas fait à manger. Il ne trouva que sa petite soeur de 5 ans, qui lui demanda où était leur maman. Harry alla toquer à la porte de la chambre de sa mère, mais personne ne répondit. Il ouvrit alors la porte.
Harry mit quelques secondes avant de réaliser ce qu’il avait sous les yeux. C’était tellement improbable, impossible, que son esprit ne parvenait pas à savoir s’il rêvait encore ou non. Pourtant, ce qu’il avait devant lui était tout ce qu’il y a de plus réel. Le cadavre ensanglanté de sa mère était allongé en étoile de mère sur le lit, le ventre déchiqueté par une large griffure. Le sang recouvrait les draps, le sol, les murs – c’est incroyable tout ce que le corps humain peut contenir comme sang. Sur les murs également, et même au plafond, se trouvaient des traces de griffure gigantesque. Harry pensa au fauve qu’il avait vu dans ses rêves, mais d’après les traces, la créature devait être au moins aussi grosse d’un ours.
La petite soeur d’Harry se tenait derrière lui.
« Harry, pourquoi t’as tué maman ? »

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Nouvelle – En ce lieu, des vers

vers-de-farine

EN CE LIEU, DES VERS

Vous savez, je n’ai encore raconté cette histoire à personne. Je profite de ce moment de solitude pour écrire ces quelques lignes histoire de laisser une trace de mon passage. Car c’est tout ce que je laisserai…ça et mon cadavre.
C’est arrivé le soir dernier, alors que je mangeais des spaghettis bolognes. Je dinais, comme chaque soir depuis trois ans, seul. C’est le cas depuis que j’ai quitté le domicile familiale et que je dirige ma vie moi-même. Bref, je mangeais tranquillement, lorsque je sentis quelque chose bouger dans ma bouche…quelque chose de vivant. Pris de panique, je recrachai machinalement ce que j’avais dans la bouche dans mon assiette, et vit un petit ver gigoter au milieu de mes spaghettis. Je poussai un cri de dégoût – et dire que j’avais eu ça dans la bouche. Il me fallu bien quelques secondes pour réaliser ce qui était en train de se passer devant moi. Il n’y avait pas qu’un ver dans mes pâtes, il y en avait au moins une bonne dizaine. Et dans mon verre d’eau…des vers aussi. Des vers partout…partout. Sur la table, par terre, sur les meubles de la cuisine. Ils semblaient se multiplier à vue d’oeil, et je ne sais comment. Je quittai donc la cuisine en courant et allumai la lumière du salon pour réaliser que d’autres vers avaient atteint la pièce. Ils étaient sur la table devant la télé, sur le canapé, sur la moquette. D’horrible vers blanchâtres qui remuaient de façon aléatoire. Je commençai naturellement à paniquer. D’où venaient-ils ? Comment avaient-ils pu envaïr ma maison en si peu de temps ? J’allai vite vérifier les toilettes – non sans écraser quelques uns de ces salopards sur mon chemin – et découvrit une énorme masse blanchâtre de vers dans la cuvette des WC, telle une pelotte de laine vivante. Il y en avait au moins autant dans le lavabo, et je les voyais sortir par le robinet. Je sentis alors quelque chose bouger dans mes cheveux…et réalisai bien vite qu’ils tombaient du plafond. J’entrepris de sortir de la maison, c’était la meilleure chose à faire, mais lorsque j’ouvris la porte d’entrée, je découvrit un jardin entièrement envahi de vers. Ils recouvraient la pelouse, le paillasson, tout ! Je réalisai alors qu’ils n’avaient peut-être pas encore atteint le premier étage – où se trouvait ma chambre. Je vis alors qu’ils commençaient à grimper par les escaliers, mais qu’ils n’en étaient qu’à la première marche. Je les devançai et parti m’enfermer dans ma chambre. C’est là que j’ai pu écrire ces quelques lignes. Mais le temps presse, ils sont déjà là, à ma porte. Je les entends gigoter. Il est temps pour moi de poser ma plume.

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Nouvelle – Elles

elles novélisation

ELLES (novélisation)

Chapitre 1 – Debut de soirée

La soirée n’avait pas encore commencé que déjà, Damien se sentait extrêmement nerveux. Il savait que ses amis (si on peut parler d’amis) allaient venir le chercher d’une minute à l’autre et il se sentait loin d’être prêt. Il n’avait jamais vraiment passé de soirée dans un bar et l’idée l’enchantait guère. Il avait accepté suite à l’insistance de ses deux amis, Brittany et Julien, qui trouvaient qu’il devait s’amuser davantage. Damien savait s’amuser, mais à sa façon. Sa passion, c’était la photographie. Il ne sortait jamais sans son appareil et prenait des photos de tout et n’importe quoi. Il trouvait cela bien plus intéressant que d’aller se saouler dans un bar. A vrai dire, Damien n’aimait pas vraiment la compagnie des autres. Il se forçait à sourire chaque fois qu’il rencontrait quelqu’un mais, en fin de compte, il se sentait bien mieux dans la solitude. Les autres ne lui avaient jamais vraiment fait de bien, au contraire. Depuis l’école primaire, ils s’étaient toujours moqués de son handicap – et ceux qui ne se moquaient pas de lui adoptaient une attitude qui déplaisait encore plus à Damien : l’hypocrisie. Damien était en effet un jeune homme tétraplégique, en fauteuil roulant. Il n’avait jamais marché. Cela avait fait fuir son père à sa naissance. Quant à se mère, elle était toujours restée distante avec lui, si bien que l’affection était quelque chose d’étranger à Damien. Il vivait désormais seul dans un appartement à Nice, pour ses études en audiovisuel. Il est vrai qu’à 20 ans, les autres avaient passé l’âge de se moquer des handicapés et personne, dans son école, ne s’était réellement moqué de lui. Mais ils avaient toujours ces regards…Damien les détestait.
La sonette de sa porte retentit. Ce devait être Brittany et Julien. Damien soupira. Il aurait préféré qu’ils oublient de passer le chercher, ce qui lui aurait permis de passer la soirée seul, chez lui, loin du regard du monde. Il leur ouvrit néanmoins la porte.
- T’es prêt ? demanda Julien.
- Il faut bien ! rétorqua Damien avec un sourire forcé.
- C’est partit alors !

Chapitre 2 – A la plage

Julien avait demandé à Damien de lui faire quelques photos avant d’aller au bar. Damien improvisa donc un shooting au bord de la mer.
- C’est bon, vous pouvez bouger, j’ai pris la photo, dis Damien.
- Okey, merci vieux ! Bon allez, pose ce gros machin, on y va ! répondit Julien.
- On va où, déjà ?
- Dans un endroit qui t’est pas très familier.
- Tu sais les bars c’est pas trop mon truc.
- Taratata, tu as dit que tu venais avec nous, tu viens. Eh puis, on sait jamais, peut-être que ce soir, c’est ton soir.
Damien savait ce que Julien voulait dire par là. Contrairement à Julien, il n’avait jamais rien fait avec une fille – comment le pourrait-il ? Il n’avait jamais eu la moindre relation depuis sa naissance. Les filles étaient quelque chose de complètement étranger pour lui, et il savait que ce serait ainsi toute sa vie. Il s’y était résigné. De toute façon, il n’en avait pas vraiment envie. A vrai dire, les filles lui faisaient peur.
Julien poussa Damien jusqu’au bar « Melvin ». Plus ils se rapprochaient, plus Damien sentait l’angoisse monter en lui.

Chapitre 3 – Au bar

Arrivé devant le bar -d’où régnaient une atmosphère anormalement rouge -, Damien observa les gens qui sirotaient leur verre.
- Je t’assure, c’est vraiment pas mon élément, tout ça, dit-il à Julien.
- Ecoute tes plus au lycée, c’est le monde extérieur maintenant. Il est temps que tu sors de ta bulle !
Damien n’aimait pas vraiment Julien, ni Brittany. Il restait avec eux car c’étaient les deux seules personnes qui acceptaient de passer du temps avec lui mais il détestait les réflexions et les sous-entendus de Julien. Quant à Brittany, elle ne disait jamais rien, mais se contentait de béquoter Julien dès qu’elle le pouvait. Damien trouvait cela irrespectueux.

Dans le bar, assises à une table ronde, se trouvaient deux jeunes filles aux yeux bleus, aux cheveux noirs et lisses, et habillées toutes les deux en robes noires. Elles se regardaient sans dire mot.
Damien, Julien et Brittany, entrèrent chez « Melvin ». Damien ne manqua pas de remarquer les regards intrigués des autres. C’était toujours la même chose, chaque fois qu’il pénétrait dans un lieu inconnu. Le comptoir se situait au bout du bar, et Damien dû se faire pousser sur toute la longueur de la salle, passant devant chaque personne qui feignaient l’indifférence.
« Deux bières. » demanda Julien arrivé au comptoir.
Damien se sentait trop petit, assis sur son fauteuil, devant le comptoir trop haut. Il cria presque « Pour moi ce sera un cocktail, s’il vous plait ! »
Il se retourna vers ses deux amis qui, déjà, se bécotaient. Comme chaque fois qu’ils le faisaient, Damien se sentait gêné. Il avait l’impression que ses deux amis oubliaient sa présence.
« Bon, moi je vais chercher une table », dit-il, sans obtenir la moindre réaction de la part de ses amis.
Il roula dans le bar et tomba sur la table de l’une des jeunes filles en noir qui le regardait. Cependant, Damien remarqua que son regard était différent de ceux des autres. Il n’y avait pas de mépris, ni de dégout. Elle le regardait comme elle aurait regardé n’importe qui d’autre, et surtout, elle lui souriait. Combien de filles avaient souris à Damien au cours de son existence. Mais ce qui le pétrifia avant tout, fut la beauté de cette jeune fille. Il n’avait peut-être jamais vu de fille aussi belle de sa vie. Voyant qu’elle le regardait toujours, Damien ne savait pas quoi dire. Il laissa échapper un « Bonjour » presque inaudible. Il senti alors demain se poser sur ses épaules et une voix lui murmura à l’oreille :
« C’est tes yeux qui ne vont plus marcher à force de reluquer mon ami comme ça ».
Damien se retourna, et vit une fille encore plus belle. Elle était elle aussi habillée en noir, avec les cheveux noirs. Elle s’assis à côté de la première fille et les deux lui firent signe de venir les voir. Damien s’exécuta et se retrouva bientôt à leur table. Ces deux filles étaient si parfaites qu’il se demanda si ce n’était pas un rêve.
- Moi c’est Marie, dis celle de gauche.
- Et moi, Carrie, dit celle de droite.
- Tu as l’air perdu à rouler comme ça au milieu du passage, reste ici, il y a une place, dit Marie.
- En fait…je cherchais une table, bégaya Damien.
- Tu viens d’en trouver une, dis Carrie.
- En fait…je cherchais pour trois personne, je suis venu avec des amis et…
- Je ne vois personne d’autre, répondit Marie.
- Ben…heu…si, regarde…
Damien se retourna vers le comptoir, espérant y voir Julien et Brittany. Il les vit allongés l’un sur l’autre sur le comptoir, en train de se bécoter avec fougue et sensualité. Le barman ne semblait pas les remarquer. Personne ne semblait les remarquer sauf Damien. Il remarqua une rose blanche, posée sur le comptoir, devant eux.
Damien se retourna vers les deux beautés qui lui souriaient, l’air satisfait.
- Alors tu fais quoi dans la vie ? demanda Carrie.
- D…Des photos.
- C’est ton métier ? demanda Marie.
- Non c’est un passetemps, un hobby…je suis étudiant en audiovisuel, sinon.
Sur ce, Damien, se retourna vers ses deux nouvelles amies. Il remarqua que l’ambiance autour de lui devenait de plus en plus rouge. Marie et Carrie, en revanche, gardaient une couleur de cheveux d’un noir profond et des yeux d’un magnifique bleu. Damien remarqua alors qu’il n’y avait plus personne d’autre dans le bar, à part Marie, Carrie, Brittany, Julien, le barman et lui-même. Toutes les autres tables étaient subitement vide.
Damien se retourna à nouveau vers le comptoir. Julien était toujours sur Brittany, mais avait enlevé son t-shirt. Brittany était désormais en soutien-gorge et la rose était désormais rose. Le barman continuait à laver des verres comme si de rien était.

Chapitre 4 – Cauchemar

« Sois pas timide…reste avec nous », dirent Marie et Carrie en même temps. Damien se retourna. Les deux filles avaient maintenant les yeux blancs, sans pupille et du sang coulaient de leurs yeux. Leurs ongles étaient maintenant des griffes et, dans leurs assiettes, nageaient des asticots.
Damien voulu d’abord fuir, mais quelque chose empêchaient ses roues de bouger. Il baissa les yeux, c’était du sang qui colaient ses roues au sol.
« T’es tout maigre, dit Carrie, tiens, tu n’as qu’à finir mon assiette, je te l’offres. »
Elle lui tendit son assiette où une centaine d’asticots gigotaient. Au milieu de l’assiette se tortillait un énorme ver qui ressemblait à s’y méprendre à un pénis vivant.
« T’as pas l’air de manger souvent, dit Marie, mange. »
Elle lui tendit une fourchettée de son assiette, qui contenait, en plus des asticots, une sorte de vulve vivante qui gigottait.
Damien n’avait qu’une envie, fuir. Ses roues étaient solidement collées au sol. Marie lui continuait de lui tendre un morceau de nourriture sur lequel se déplaçaient des asticots.
Carrie se leva.
« Tu sais pas encore comment t’y prendre…on va t’aider. »
Elle alla derrière lui pour lui tenir les bras. Marie s’avança vers lui tout en restant assise. Elle lui tendait toujours sa fourchettée.
Derrière Damien, Julien et Brittany faisaient l’amour sur le comptoir. Le barman nettoyait la rose qui était maintenant rouge et pleine de sang. Il avait également du sang qui lui coulait des yeux.
Sans qu’il puisse expliquer pourquoi, Damien finit par ouvrir la bouche et avala la part que lui tendait Marie. Il sentit l’asticot se mouvoir dans sa bouche, puis avala avec une grimace. Les deux filles sourirent de satisfaction. Déjà, Marie lui tendit une autre part, qu’il avala également.
Les deux filles avaient maintenant de grandes dents pointues, qu’elles exhibaient en ricanant, pendant qu’elles donnaient à manger à Damien.
« C’est toujours un peu dégueu, la première fois. » fit Carrie en lui tenant toujours les bras.
Damien avait des asticots plein la bouche. Il avala avec énormément de difficulté et fini par terminer l’assiette de Marie – celle qui contenait les vulve vivante. Marie lui tendit alors l’assiette de Carrie, où gigotait toujours le ver géant en forme de phallus.
Derrière lui, Brittany et Julien faisaient toujours l’amour.

Chapitre 5 – Fin de soirée

La porte d’entrée de l’appartement de Damien s’ouvrit timidement. Damien entra dans son appartemment avec difficulté. Il roula jusque dans sa chambre et se leva de son fauteuil.
« Quelle soirée…j’aurais dû prendre leurs numéros. »

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Nouvelle – Alessa

Alessa

ALESSA

Ce n’étais pas la première fois qu’Alessa se baladait seule en forêt, loin de là. Elle avait eu la chance de naître dans un milieu campagnard avec un bois non loin de chez elle, et elle avait prit l’habitude, elle qui était très solitaire, de marcher seule dans ce bois. Elle avait 16 ans maintenant mais cette habitude provenait de son plus jeune âge. Parfois, ses promenades pouvaient durer des heures. Il faut dire que son imagination travaillait activement durant ses excursions nocturnes. Chaque soir, elle se faisait des films dans sa tête, ce qui lui paraissait bien plus plaisant que de passer du temps avec de vraies personnes. Les vrais gens lui paraissaient ennuyeux, souvent stupides et généralement méchants. Les gens qu’elles faisaient apparaître avec son imagination était bien plus intéressants.
Ce soir-là, donc, Alessa se promenait comme à son habitude. Parfois, elle courait. Cela stimulait son imagination. Cette fois, cependant, elle fut interrompue par quelque chose d’inhabituel : sur un arbre, se trouvait une trace de griffure ensanglantée. Il faisait nuit, mais grâce à la lueur de la lune, Alessa distinguait clairement le sang qui coulait des quatre traits qui avaient blessé l’arbre. Elle ne remarqua que quelques secondes plus tard le t-shirt rose ensanglanté, qui devait appartenir à une petite fille, et qui gisait sur le sol, au milieu des feuilles mortes. Alessa n’était pas du genre à paniquer, mais cette découverte singulière l’angoissait. Elle décida donc de rebrousser chemin pour avertir ses parents. Il lui fallait bien une quart d’heure pour rentrer chez elle, calcula-t-elle. En chemin, elle trouva un animal mort (un écureuil ?) qui lui avait échappé à l’allée. Il semblait avoir été coupé en deux et il ne restait plus que le bas de son corps (ventre, pattes arrières, queue). Alessa pressa son pas. Le fait d’avoir une imagination débordante était parfois un avantage, mais, cette fois, c’était plutôt un handicap : des cris de bêtes imaginaires résonnaient dans sa tête. Etait-ce uniquement son imagination ? Elle se le demandait. Son coeur battait de plus en plus fort. Avait-elle vraiment vu cette griffure et  ce cadavre ou l’avait-elle encore rêvé ? Les doutes commençaient à s’installer dans son esprit au fur et à mesure qu’elle se rapprochait de chez elle. Fort heureusement, elle apercevait déjà sa maison au loin, avec les lumières encore allumées.
C’est alors qu’une vision d’horreur lui apparu. A quelques mètres d’elle, accroché à une branche d’arbre par les pieds, se trouvait le corps d’un homme gisant sans vie, les bras vers le sol, le ventre ouvert. Ses boyaux étaient déposés sur le sol, juste en dessous du corps. Alessa hurla d’abord de surprise, puis de terreur. Elle se mit cette fois-ci à courir vers sa demeure. Elle était maintenant sure que les bruits de craquement et de pas qu’elle entendait étaient bien réels : une imposante bête la suivait. Elle ne la voyait pas, même en se retournant, mais il fallait vraiment être sourd pour ne pas entendre ses bruits de pas. Apparemment, la créature était énorme, peut-être plus grosse qu’un homme.
Enfin, elle sortit du bosquet et atteint finalement sa maison. Là, ses parents l’attendaient pour dîner.
- Tu es toute essouflée…tu as courru ? demanda sa mère.
- Oui, dit Alessa, je crois que mon imagination m’a encore joué des tours…

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